Je sors de la morgue rapidement, l’adrénaline en moi n’est pas encore descendue et si j’hésite ne serait-ce qu’une seconde je réquisitionnais le bâtiment pour quelques heures, moi et Ley seulement…oula je me perds ! J’entends Carlos klaxonner pour que je me dépêche et c’est dans la tranquillité que je rentre dans la voiture de police.
C’est fou ce qu’en quelques heures je peux la détester autant que je l’aime. Elle a ce pouvoir sur moi qu’elle va sans doute exercer encore quelques semaines, mois ou peut être années qui sait, l’amour nous laisse bien dans le doute aussi longtemps que l’homme respire.
Je pousse brusquement les portes du commissariat, les agents sursautent, certains ne cillent même plus un mouvement ayant l’habitude de ma mauvaise humeur seulement j’arbore cette fois un sourire colgate ! J’ai jamais été aussi heureux de ma vie.
En fait si je le serai sûrement quand je lui demanderai de partager ma vie à jamais, quand elle devra faire le choix entre notre schizophrénie commune et une vie heureuse qu’on sera prêt à accepter, qu’on pourra enfin se délivrer de cette dépendance à la douleur et à souffrir avec l’autre. Quoi qu’on en dise ça serai un choix très dur, comme un drogué dépendant de sa dose devra décider de faire une cure et de vivre normalement.
Oui ce jour là je serai le plus heureux des hommes.
Je m’assois tranquillement sur mon fauteuil tourne le siège pour me mettre devant la fenêtre ou les rayons du soleil sont découpés en tranches par des stores. Je regarde le ciel, pensif, j’essaye d’imaginer ma vie à ses côtés heureux, plein de vie ! Et qui sait…peut être que nous ne serons pas seuls.
Je ne peux pas m’empêcher de rêver comme un adolescent, est-ce mon côtés en manque d’amour qui ressort ? Est-ce qu’elle à réveiller en moi la sensibilité qu’on avait piétiné et écrasé depuis mon enfance ? Je ne sais pas. En tout cas, j’aimerai vraiment que ce rêve se réalise car dedans, je ne vois pas de sang des victimes tâcher notre tableau blanc.
Mais avant tout ! Avant d’être heureux, avant de pouvoir sourire à ses côtés et la faire virevolter dans les airs en tant que Madame Meryl, je dois me débarrasser de mes démons.
L’assassin doit tomber.
J’attrape les photos et le dossier de la dernière victime. Adrien Holbein, vingt six ans, jeune propriétaire d’une grande villa dans le quartier résidentiel du Sud. Ses parents sont avocats tous les deux mais ils avaient coupé définitivement les ponts avec leur fils qui était devenus un débauché enchaînant fille sur fille et parfois même des garçons, il y a de ça trois ans. Je regarde les photos de son crâne décomposé, j’essaye d’analyser la scène, l’esprit de l’assassin.
Quelques chose cloche.
Oui il manque quelques, j’ai l’impression que…que rien ! Je ne remarque rien ! Comme si je portais des lunettes noires qui m’aveuglaient. Je ne voyais plus rien !
Les photos étaient là devant moi, son crâne éclaté, le sang séché sur les cheveux mais rien ! Je ne ressentais rien ! Pas la moindre idée ! Pas la moindre piste !
Je crois que…Oui…je crois que je n’ai plus aucun instinct ! J’ai perdu mon talent, je ne sais plus analyser une scène de crime ! Je n’ai plus rien ! Je crois même que j’ai perdu mon désir de vengeance. Le seul visage que j’aperçois c’est celui de Ley. Qu’est-ce que ça veut dire ? Qu’elle m’a aveuglé ? Qu’elle a pris tous mes sentiments ? Elle m’a enlevé le visage de Jim et le désir de le venger.
Je ne comprends plus rien, impossible de me concentrer lorsque j’essaye d’imaginer la criminelle rien ne me vient. Juste son regard, son sourire, ses lèvres, sa peau douce.
Rien.
Je sors du bureau, anesthésié, le prix du bonheur a été l’envie de tout autre chose et l’avenir me frappait au visage comme un vent gléné. Si jamais elle venait à me quitter que me resterait-il ?
- Ça ne va pas Stef ? Me demande Marissa
- Je…, je regarde Marissa complètement à l’ouest
- Vous voulez que j’appelle un médecin Inspecteur ? Me demande ma secrétaire
- Non pas la peine.
Je pars les laissant seuls dans leur doute. Encore perdu dans ma maladie, je prend peu à peu conscience qu’à part elle plus rien n’a de sens ! Qu’à part son sourire tout le reste est fade et sans importance !
Je me rend compte que je ne suis plus rien, une coquille vide, elle m’a volé mon cœur.
C’est plutôt romantique dans un sens mais d’un autre je trouve cette perspective effrayante car pour la première fois de ma vie j’ai peur de ne plus savoir qui je suis, ne plus savoir vivre si elle disparaissait.
Sans me rendre compte, perdu dans mes réflexion, je me retrouvais dans ce petit quartier, devant une grande bâtisse.
Est elle en haut ?