Le Grenat Bleu (Yaoi)

Jeudi 29 avril 4 29 /04 /Avr 22:42

 

 

 

Coucou! Non vous ne rêvez pas, c'est bien moi, moins d'une semaine après avoir publié un chapitre de l'oublié!

J'avoue c'est impressionnant! Il faut savoir que vos commentaires et votre présence m'a grandement motivée, en plus d'un regain d'inspiration.

J'espère que ce chapitre vous plaira, l'intrigue est dévoilée, ça va devenir un peu compliqué pour vos petits neurones =P

je plaisante je suis sûre que vous allez suivre et j'espère que vous serez toujours intéressées ^^

Il faut que vous sachiez qu'avec cette histoire j'essaie un peu de bousculer les habitudes du type:

Une histoire un couple. Hors de question.

Une histoire un thème. Même pas la peine d'y penser.

Une histoire une intrigue. Vous avez vu la vierge?

Donc ne vous dites pas tout de suite " l'histoire c'est comment un gosse de cité va s'adapter à une vie dans une maison close". Nope.

Vous seriez déçues ^^.

 

Encore une fois je sais pas trop quoi vous dire, si ce n'est que les scorpions passent à Strasbourg le mois prochain, et qu'il est hors de question que je les rate.

 

A part ça...

Vous pensez qu'il faut que je change le design du blog?

Vous le supportez encore?

 

Tiens j'aime beaucoup la nouvelle chanson de rihanna, te amo ^^. Chacun son truc hein, on peut apprécier de la mouise parfois ^^. Après Stromae et tout ... xD

 

Tout de suite l'horoscope:

(Cherchez pas, ça m'amuse).

 

Bélier: Si vous prennez le bus, faites gaffe à la mamie en face de vous. Je sais pas si vous avez vu "jusqu'en enfer" mais...... ah ah ah

Taureau: La lune en diagonale peut vous aider à guérir vos maux de dos. Pour cela, penchez la tête de côté en la fixant, et curez vous le nez.

Gémeau: Votre copain vous trompe/ Votre mec en vue va se taper votre copine.

Cancer: Je sais pas si on vous a déjà dit à quel point vous êtiez géniale!

Vierge: Coller son chewing gum sous la table/rampe c'est mal! ... Mais tellement drôle quand quelqu'un met la main dessus ensuite.

Lion: Si vous cessiez de vous plaindre, vous auriez plus d'amis.

Balance: Non, cette idée est nulle.

Scorpion: Bien sûr qu'on vous a vue écraser cet insecte!  Monstre!

Sagittaire: Jupiter vous fait la gueule, vous avez cassé son plan avec mercure. Pour la peine vous allez vous prendre un pied de chaise. Bien fait!

Capricorne: Saturne se fend la poire, en même temps, vous avez vu votre gueule au réveil? Il y a de quoi!

Verseau: Heu. Vous feriez bien d'analyser l'objet qu'est le "lisseur". Ca fera du bien à votre tignasse.

Poisson: Semaine propice aux pellicules. Have a good time!

 

Et tout de suite, le chapitre!

(Putain d'écriture de merde, si j'écris plus gros ça s'empile et c'est illisible...)

 

 

 

Chapitre 16:

 

  

-Alors elle te plait?

 

Une main plaquée sur mes lèvres pour réprimer un hoquet d'horreur, je recule de deux pas et m'éloigne du seuil de mes futurs appartements.

 

Mes yeux vont de mon père et son sourire à l'entrée de ma chambre, bleue et jaune clair, meublée avec goût de toute évidence, mais avec un léger défaut.

 

Le genre de défaut qui fera que je vais continuer à pioncer dans la chambre de bonne.

 

-Elle est... Bleue.

 

Je souffle ce dernier mot comme si je n'avais plus d'air dans les poumons, ma voix partant pathétiquement dans les aigus. Je ne peux pas mettre un pied là dedans. Hors de question.

 

-Owen, ça va?

 

Une main se pose sur mon épaule et je lève les yeux vers mon père qui affiche une mine inquiète. Mais alors que je reprends mes esprits sous sa poigne rassurante mon regard se bloque sur la couleur de ses yeux et d'un coup les souvenirs reviennent en rafale.

 

« Mon bel Owen, viens près de moi. Ca sera notre secret. »

 

Je rejette sa main et recule, secouant la tête comme pour faire partir ces images.

 

« On ne dit rien à maman d'accord? Pose ta main là. »

 

Je siffle de dégoût, une nausée me prend et je cherche des yeux une salle de bain.

 

« Pourquoi tu t'arrêtes? Laisse tomber, ne bouge plus. »

 

Le souvenir de mouvements saccadés contre ma peau achèvent de me démolir et je tombe à genoux sur le tapis du couloir, avant de rendre mon petit déjeuner en sanglotant aux pieds de mon père et du décorateur d'intérieur.

 

Les bras de Bryan s'enroulent autour de moi et je tente de m'échapper vers l'avant.

 

-Owen. C'est fini Owen. Calme toi!

 

Je me sens soulevé par les épaules et remis sur pied, puis trainé vers la chambre de Plume, la plus proche dans les environs.

 

Alors que je m'éloigne de la chambre bleue, mes yeux cessent de me bruler et mon ventre semble se remettre en place. Je m'assoit dans un des fauteuils en velours bordeaux terriblement kitch des appartements du gothique et Bryan me pose un linge trempé sur le front. Je respire enfin.

 

-C'était quoi ça Owen?! Articule Bryan en s'agenouillant devant moi.

 

La tête penchée en arrière sur le dossier, je savoure la fraicheur de la serviette. Mon dieu, je pensais avoir oublié tout ça.

 

-Owen! S'exclame mon père, me faisant sursauter. C'était quoi cette crise de panique?!

 

Le silence dans la pièce m'a presque fait oublier la présence de Plume. Je soulève le coin du linge et l'aperçoit reculé dans un coin de la chambre, absent, presque invisible, comme s'il n'était pas là. Comme s'il n'existait pas. Je baisse les yeux sur Bryan et son regard me fige tant il est glacial.

 

Instinctivement je sais qu'il a compris.

 

Comme je suis con.

 

Comme si un homme tel que lui pouvait ignorer les signes.

 

Comme si un maitre de putes ne savait pas reconnaître une victime d'abus lorsqu'il en voit une.

 

-Je crois... Un ricanement m'échappe tant je me trouve pathétique. Je crois que je n'aime pas le bleu Bryan.

 

Il passe une main tremblante sur son front puis son visage et souffle:

 

-Donne moi son nom, Owen.

 

Je ne réponds pas, je lève les yeux vers Plume et le fixe, espérant le faire sortir.

 

-Owen! Son nom!

 

Je tourne la tête vers la porte. Je veux m'en aller. Une main s'empare de ma mâchoire et me remet face à mon père qui élève la voix:

 

-Réponds!

 

-Je sais pas!

 

-Son nom!

 

-J'en sais rien! Je me souviens pas, j'étais trop jeune!

 

Une larme dévale le long de ma joue, bien vite suivie par une seconde.

 

Ses mains se placent de chaque côté de mon visage et il chuchote.

 

-C'était qui?

 

Je tente de détourner les yeux.

 

-Ton professeur? Ton beau père? Ton...

 

Je sursaute et lui aussi.

 

-Ton beau père...

 

-Laisse moi, s'il te plait, je ne veux plus y penser. Ca va. Je vais bien.

 

J'inspire profondément et il recule. Je me lève et me dirige vers la sortie. Au moment ou ma main frôle la poignée il me demande une dernière chose:

 

-Quel âge...

 

-Huit ans.

 

Je ferme la porte derrière moi et me dirige vers la salle ou aura lieu mon cours de sciences politiques.

 

J'ai oublié une fois, je peux bien recommencer.

 

 

 

 

Je croise Raziel dans l'un des couloirs. Il ne me parle pas, moi non plus. Depuis l'autre jour où il m'a « réconforté » à la suite de mon désastreux cours de maintien, on s'ignore plus ou moins. Je sens que si je lui parle il va m'envoyer chier.

 

Il a l'air tendu depuis. Comme s'il ne savait pas comment se comporter. Cela fait une semaine. Je pense que ça ne va pas tarder à claquer.

 

Je m'installe face à mon professeur et passe une heure à tenter de comprendre les ficelles des mouvements politiques. Quand je pense qu'au quartier je planais déjà lorsqu'on me parlait de philo ou de fonctions affines...

 

Ici, et depuis une semaine à présent, les cours se succèdent à une vitesse vertigineuse. Toute la matinée, et le début d'après midi je vois défiler les professeurs, jusqu'à ce que quinze heures sonnent et que je puisse aller rejoindre mon père pour qu'il m'emmène avec lui parfois dans ses usines, d'autres fois à des réunions ou la seule consigne que j'ai est de me taire vu que je n'ai aucune éducation. Voilà cinq jours que cela dure, et j'en ai déjà assez. Indigo n'est toujours pas revenu. Aujourd'hui après le repas de midi, Bryan a voulu me faire la surprise de mes nouveaux appartements. C'était gentil de sa part malgré le fiasco... J'ai des remords par rapport à lui. Il avait l'air tellement fier, tellement content de pouvoir me faire plaisir...

 

Lorsque je sors enfin, c'est pour croiser quelques hôtesses joyeuses avec une serviette sous le bras ou sur l'épaule. Je détaille progressivement toutes ces courbes enchanteresses et les écoute me proposer:

 

-Owen! Tu viens avec nous? On va prendre un bain.

 

-C'est gentil les filles de penser à moi, mais j'ai rendez vous avez le patron pour apprendre les ficelles du métier.

 

Je leur fais un sourire et me dirige vers le bureau de mon père. J'appréhende. Je sais qu'il ne me laissera pas tranquille après la crise de tout à l'heure. Mais je veux juste qu'il oublie et qu'il fasse comme si de rien n'était.

 

 

 

 

Lorsque je pénètre dans son bureau, c'est pour le trouver songeur, appuyé contre le rebord de la fenêtre, une bague en argent sous les yeux. Je m'avance et le voit la caresser du pouce comme si elle avait été faite d'or et de diamants. Le soleil plonge sur le métal et le fait briller, mais alors que je lève les yeux vers le visage de mon père, une lumière bleue est reflétée sur sa peau, et l'origine en est la bague.

 

Je fronce les sourcils et me retiens de reculer. Mes yeux se plissent et je regarde plus intensément l'anneau épais, cherchant une pierre bleue sertie sur le dessus de la bague.

 

Rien.

 

Il la tourne entre ses doigts et je vois enfin ce que je cherchais.

 

La pierre.

 

D'un bleu irréel.

 

Sertie non sur le dessus mais à l'intérieur de l'anneau. Presque enfouie sous l'argent.

 

-Qu'est-ce que c'est?

 

Je n'ai pas pu m'en empêcher.

 

Mon père sursaute et ramène la bague contre son torse avec une grimace mauvaise.

 

Un peu plus et je l'aurais vu siffler « Mon précccccieux » avec des yeux gros comme des soucoupes.

 

Il soupire.

 

-Excuse moi. C'est un grenat.

 

-Un grenat?

 

Je me souviens avoir eu un professeur d'histoire fanatique de gemmologie. Et d'après les bribes qui me reviennent de ses discours, il y avait bien une pierre qui ne pouvait être bleue. C'est étrange parce que je me souviens que je m'étais dit que je l'adorerai pour cette raison. Et cette pierre était un grenat.

 

J'en suis certain.

 

-Un grenat ne peut être bleu, je souffle en reculant.

 

Mon père sourit et joue avec sans toutefois la passer à son doigt. Il finit par la poser sur son bureau et se sert un verre d'alcool.

 

-Pourtant celui ci l'est, répond-il avec un regard effrayant, mêlant bonheur et extase.

 

-Les grenats bleus n'existent pas, je répète, avec fermeté, comme si je parlais à un dément dans le déni.

 

-C'est ce qui fait sa valeur, fils. Regarde le bien! Il est là...

 

Il marque une pause et reprend, mettant un poids fou dans le sens de ses mots:

 

-...Mais il ne peut exister.

 

Un frisson glacé me traverse et c'est comme si mes pieds s'étaient figés dans le sol. C'est de la folie. Ca ne peut être qu'une autre pierre avec des similitudes dans les minéraux. Point.

 

La porte s'ouvre. Je sursaute. Mon père ne bouge pas d'un centimètre.

 

Raziel entre d'un pas lent.

 

-C'est malsain Carlisle. C'est malsain et ça vous fera perdre la raison. Même toute la volonté du monde de voir ce que vous savez qui existe ne vous donnera pas la force d'en supporter l'existence.

 

Mon père ne fait que fixer la bague et ne réagit pas. Comme s'il n'entendait pas. Totalement hypnotisé.

 

Mais lorsque la main de l'indien couvre la bague de la vue du grand roux, il bondit et se précipite pour la reprendre, et à cet instant j'ai vraiment l'impression de voir Bilbon Saquet se ruer sur Frodo pour récupérer son anneau. Sauf que là, Frodo est un canon à la peau rouge, qui le bloque d'une main à la gorge et hurle:

 

-ASSEZ! CARLISLE!

 

Aussitôt, telle une poupée de chiffon mon père s'écroule dans son fauteuil, et papillonne péniblement des cils comme s'il avait du mal à se réveiller.

 

Pour ma part je n'avais pas bougé d'un pouce, statufié, et avais assisté à une scène tout bonnement irréaliste.

 

Comme si cette putain de bague pouvait avoir quelque chose d'intéressant outre le fait qu'elle soit sertie à l'envers.

 

 

Et que la pierre soit bleue alors qu'elle ne peut physiquement pas l'être. Ce qui se résout facilement par la simple phrase « ce n'est pas un grenat. ».

 

Point.

 

Et toute cette scène mélodramatique pue simplement la perte d'esprit.

 

Ces deux mecs sont barrés. « Ca n'existe pas mais c'est là ». Certes.

 

Je soupire, n'importe quoi.

 

La bague disparaît dans la poche de l'indien, et il demeure immobile jusqu'à ce que Carlisle reprenne tout à fait ses esprits et secoue une main lasse dans notre direction.

 

-Sortez. On se verra ce soir à la soirée. Owen, tu as quartier libre, profite-en pour bosser sur quelque chose.

 

 

 

 

Lorsque nous refermons la porte derrière nous, j'ouvre la bouche pour parler, mais Raziel secoue la tête (ainsi que son immense queue de cheval par la même occasion) et me déconseille silencieusement de lui poser des questions.

 

Mes lèvres se referment alors et je détourne le regard avant de m'éloigner pour rejoindre la salle de bain des hôtes et me détendre un peu avec les filles de la maison.

 

Elles ont une culture tout bonnement époustouflante pour la plus part. Bien loin des greluches que l'on rencontre habituellement.

 

Qu'est-ce que l'on peut penser comme connerie quand on veut oublier un événement étrange.

 

Je sais très bien qu'elles sont toutes à mes petits soins parce qu'elles ont l'espoir de devenir madame Carlisle ou un truc du même acabit. Je n'ai pas le QI des hôtes, mais je ne suis pas totalement idiot tout de même!

 

 

 

 

Au repas du soir, une bonne nouvelle transperce la foule de banalité échangées:

 

Indigo va revenir dans la nuit.

 

Merci mon dieu, enfin quelqu'un qui va me changer les esprits et me faire réellement oublier cette journée désastreuse.

 

J'apprécie Plume d'ordinaire, mais je sens qu'après ce qui s'est passé ce matin dans sa chambre il ne va pas me laisser tranquille.

 

Je sors de table tandis que les invités et leurs hôtes vont pour commencer leurs activités de la nuit, et me dirige vers la bibliothèque pour lire avant d'aller me coucher. Étrangement, les charmes des hôtesses ne me font pas envie ce soir.

 

C'est peut-être aussi que celles avec qui je m'entend sont prises.

 

Toujours est-il que je pique du nez dans mon bouquin.

 

La chartreuse de parme.

 

Je t'en foutrais moi...

 

 

 

 

Lorsque je me réveille, un coup d'œil à l'horloge m'indique qu'il est une heure du matin passée.

 

À travers la fenêtre, je peux apercevoir les branches des arbres balancées par le vent, comme autant de bras décharnés tentant d'agripper l'obscurité. Je frémis.

 

Je remet mes chaussures retirées plus tôt pour ne pas salir le canapé sur lequel je me suis écroulé, et sors dans le couloir.

 

Le manoir résonne de rires et de gloussements, merci à mon père, les chambres sont insonorisées et je n'ai pas droit aux gémissements qui doivent être produits à droite à gauche.

 

Je croise quelques couples tandis que je gravis l'escalier qui mène à l'étage. Une main sur la rambarde, je me tourne dans la direction de la chambre d'amis. Mais pas sur le plancher sont assourdis par le tapis rouge bordeaux.

 

Au bout du couloir je peux apercevoir mes futurs appartements. Le tapis devant la porte déjà été changé. Et je me rends compte que le personnel du manoir, en plus d'être totalement invisible, est diablement efficace.

 

D'un pas lourd je passe devant la porte de plume, il doit être avec un client ou avec une cliente.

 

J'avoue ne pas vouloir le savoir...

 

Mais alors qu'il ne reste que quelque mètres, le bruit de talons hauts qui martèlent le sol avec une régularité effrayante se fait entendre.

 

Une démarche que j'imagine déjà parfaitement mesurée, calme et royale.

 

Je ne sais pourquoi cette démarche me perturbe à ce point et me fige dans le couloir, alors que toute la journée j'entends les hôtesses se déplacer sur leurs talons vertigineux...

 

Toujours est-il que je me retourne, immobile, et attend de voir la créature franchir le coin du couloir.

 

Lorsque je l'aperçois enfin, je ne sais dire si elle est une hotesse ou une cliente, tant ses vêtements sont fins et délicats, seyants sans être vulgaires, une robe blanche à la Marilyn Monroe, vaporeuse jusqu'à ses genoux dévoilant ses interminables jambes d'une blancheur immaculée, rivalisant presque avec le tissu qui recouvre le haut de son corps.

 

Ses chevilles sont enserrées dans des rubans de satin blanc, reliés à ses talons hauts, et je force mon regard à remonter vers son visage.

 

Lorsque j'y parviens, c'est pour tomber dans de magnifiques orbes grises cerclées de noir. Elle n'a pas cessé d'avancer dans ma direction, et n'a rien raté de mon examen hautement appréciateur.

 

Elle sourit, et je rougis.

 

Je suis béat devant une telle beauté, une telle grâce, un maintien aussi parfait, et un sourire aussi divin.

 

Je ne peux m'empêcher de lui sourire stupidement, et passe une main dans mes cheveux, alors que je souhaiterais la passer dans les siens, d'un blond si clair quil en paraît presque argenté sous l'éclairage tamisé du couloir.

 

Elle passe devant moi et s'évanouit dans l'obscurité du manoir, se retournant une dernière fois pour me relancer en sourire aussi magnifique qu'enchanteur.

 

Sans doute partie rejoindre son hôte, car jamais je n'aurais pu rater une telle perfection si elle avait vécu au manoir.

 

Et la réalité cruelle me revient en pleine face. Si elle vient dans ce manoir, elle doit vivre des nuits de sexe endiablé avec des hommes cultivés, musclés, intelligents et foutrement doués au lit.

 

Globalement aucune chance pour moi, de pouvoir un jour à l'approcher plus que de raison.

 

 

 

 

Un ricanement me fait me détacher du bout de couloir vide que je fixe depuis quelques minutes.

 

Je me retourne et tombe nez à nez avec Plume sur le seuil de sa porte, saluant sa cliente de la nuit, qui dévale les escaliers un sourire ravi aux lèvres.

 

Le jeune homme me regarde et s'esclaffe à nouveau.

 

-Quoi? Je m'exclame. Qu'est-ce que tu as?

 

Il s'appuie contre le chambranle de la porte et croise les bras sur son torse dévêtu avant de répondre:

 

-Elles sont fausses.

 

-De quoi tu parles?

 

-Ses dents. Elles sont fausses.

 

-Comment le sais-tu? Et quelque cela peut te faire?! Il n'y a pas que ses dents qui sont superbes! Elle est parfaite, as-tu vu la cambrure de ses reins? La longueur de ses jambes? La perfection de son visage? De sa peau? Jamais je...

 

-C'était Ambre, Owen.

 

À ces mots, ma bouche se referme, et je pointe du doigt ma chambre:

 

-Je vais aller par là. Et on va faire comme si cela ne s'était pas passé. D'accord?

 

Et je me retourne sans un regard pour le gothique.

 

Je viens de flasher sur un travesti. Quelle honte ! Et en plus, c'est celui qui me poursuit depuis des jours et des jours.

 

Une main me rattrape et agrippe mon poignet:

 

-Quoi?

 

-Viens par-là.

 

-Lache moi, je m'exclame.

 

Malgré moi je me fais entraîner dans les appartements de Plume, que j'ai un peu trop vu pour aujourd'hui à mon goût.

 

Le jeune homme me fait asseoir sur un fauteuil, et referme les draps défaits de son lit.

 

Il se rapproche et s'installe sur le sol devant moi avant de souffler:

 

-Il est un briseur d'hétéros. Des centaines d'hommes ont craqué pour ses hanches fines, sa grâce plus que féminine, et ce côté qui restera toujours indéniablement masculin. Tu n'as aucune honte à avoir. Et même si pour te rendre compte qu'il est attirant tu as dû le voir travesti, il faut que tu saches qu'il reste un homme et que celui que tu as désiré il y a quelques secondes est un homme. Et ce n'est pas un drame Owen! C'est naturel. Et si ce qui te fait peur c'est de revivre...

 

-Ta gueule!

 

-Il y a une putain de différence entre pédophilie et homosexualité Owen!

 

J'articule difficilement:

 

-Je suis hétéro, et ça n'a rien à voir.

 

-Vraiment?

 

-Oui.

 

-Tu l'es ou tu veux l'être?

 

Je ne répond pas et il continue:

 

-Ce n'est pas un sexe que tu aimes ou tu désires Owen, c'est un être vivant, qu'il soit homme ou femme tu peux le désirer.

 

-Je n'aime pas les hommes Plume, lâche moi à présent.

 

Je me lève, et me dirige vers la porte, souhaitant mettre fin à cette conversation ridicule. On fait tous des erreurs, pas la peine de s'étaler dessus.

 

Mais encore une fois il m'empêche de fuir, et se place entre moi et la porte. Dans ses yeux noirs je peux voir qu'il est décidé.

 

-Tu n'aimes pas les hommes? Tu es certain?

 

-Bien sûr que je suis!

 

-Un hétéro un vrai?

 

-Oui!

 

-Alors ferme les yeux !

 

J'éclate de rire.

 

-Tu rêves!Je ne te laisserai pas me peloter!

 

-Si tu es hétéro, alors tu ne risques rien tu ne ressentiras rien.

 

-A part du dégoût, rien du tout.

 

Il s'approche et pose une main sur mon torse.

 

-Un peu de dégoût, et nous te laisserons tranquille, je ferai passer le message. Ferme les yeux maintenant.

 

-Hors de question !

 

-Je le dirais aussi à Ambre, il cessera de te harceler.

 

Je reste silencieux. Ça c'est intéressant.

 

Je soupire et ferme doucement les paupières...

 

Avant de les rouvrir brusquement et de m'exclamer:

 

-Je veux que ce qui va se passer ce soir reste entre nous !

 

-Fais-moi confiance.

 

Je le sens qui s'approche, une odeur de sexe me vient aux narines.

 

-Tous les hommes ne sont pas des boules de poils et de testostérone.

 

Son corps se colle contre le mien, et je sens le relief de son torse contre ma peau, pas la moindre masse graisseuse qui pourrait donner l'illusion d'être une poitrine féminine.

 

Rien que du muscle, des pectoraux bien dessinés, une ligne d'abdominaux et un anneau au nombril.

 

Ses mains glissent sur mon T-shirt.

 

-Nous pouvons être aussi souples que les femmes, nous connaissons chaque recoin de ton corps parce que nous avons le mêmes.

 

Sa main glisse sur mon ventre, et s'infiltre sous mon haut, légèrement moite de ses ébats passés.

 

Un frisson me traverse et je repousse, ouvrant les yeux et crachant:

 

-Arrête ça! Je t'ai dit que je n'étais pas intéressé!

 

-Shhhh. Attend encore. Le plaisir n'a pas de sexe.

 

Je soupire et le regarde s'éloigner pour attraper un ruban noir suspendu à un fauteuil.

 

-Tu comptes m'attacher ?

 

-Je veux juste que tu gardes les yeux fermés.

 

-Il est hors de question que tu me mettes ça sur les yeux, je ne sais pas où cela a traîné..

 

-Ne fait pas l'enfant !

 

Et je le vois s'approcher avec un sourire doux comme si je n'avais rien à craindre de ses charmes. Il passe dans mon dos, et noue le ruban sur mes yeux m'aveuglant complètement. Chuchotant par la même occasion:

 

-Rien de ce qui se passera ici ne sortira, laisse-toi aller.

 

Il frotte son visage contre ma nuque, et le souffle qui glisse sur mon oreille m' électrise.

 

Sans le sens de la vision, il est plus dur de garder à l'esprit que celui qui se frotte contre moi est un homme.

 

Ses mains passent par-dessus mes épaules et s'égarent sur mon torse tandis que sa langue se perd dans mon cou.

 

Je fais un pas en avant pour échapper à son emprise, mais il me suit et au contraire me pousse encore d'un pas, si bien que je bascule en avant, par-dessus un pouf sur mon passage et m'écroule au sol. Aussitôt je me retourne et porte ma main au tissu pour le retirer et me mettre à hurler. Mais un poids sur mes cuisses m'immobilise, tandis qu'une main éloigne mes doigts de mes yeux.

 

Une paire de lèvres plus douces que ce que j'imaginais se posent sur ma bouche avec une légèreté surprenante. Une seconde je m'apprête à répondre à ce baiser qui s'annonce délicieux, mais je me reprends et le repousse brutalement en arrière, le suivant dans sa chute jusqu'à le surplomber.

 

Toujours aveugle, ma main se dirige vers son cou, et je vais pour le serrer jusqu'à lui faire suffisamment peur pour qu'il me laisse tranquille, mais un gémissement me parvient et pulse sous mes doigts tandis que deux jambes s'enroulent comme des serpents autour de mes hanches.

 

Ses bras passent autour de mes épaules et des lèvres viennent à nouveau chercher les miennes.

 

Je halete et mes doigts s'emmêlent dans ses cheveux pour l'écarter de moi, mais alors que je tire et que ses lèvres se détachent de leurs jumelles, un nouveau gémissement de sa part se répercute comme un écho le long de mon épine dorsale jusqu'entre mes cuisses.

 

Ma main se fige et finalement fait le chemin inverse jusqu'à son crâne que j'attire vers moi pour reprendre le baiser là ou il en était.

 

Comme une libération, cette fois sa langue se fait plus aventureuse et pénètre ma bouche sans attendre mon autorisation.

 

Ma main libre glisse le long de son dos jusqu'à ses reins délicieusement cambrés contre moi. D'une poussée je le redresse contre moi et il s'installe à cheval sur mes genoux repliés.

 

Mon souffle se fait erratique tandis que ses mains me parcourent, que ses cuisses m'enserrent, que son parfum m'enivre, et que sa langue me quitte pour rejoindre ma jugulaire.

 

Je gémis et ses mains tirent sur mon t-shirt jusqu'à ce que je lève les bras pour le laisser me le retirer. Son bassin ondule contre moi, je ne peux plus ignorer le fait qu'il est un homme, étrangement, je survis.

 

Mes doigts osent enfin se poser sur son torse, là ou il y aurait du y avoir des seins. Leur absence est quelque peu déroutante, mais lorsqu'une main se pose fermement sur mon érection comprimée dans mon jean, j'oublie jusqu'à mon nom et émet un long sifflement appréciateur.

 

Et lorsque la porte de sa chambre s'ouvre soudainement au même instant ou il défaisait ma braguette d'un geste expert, je ne peux m'empêcher de rire à l'entendre chasser Indigo de la pièce à grand renfort d'insultes de toute sorte.

 

La surprise a fait retomber toute mon excitation et je retire d'un geste lent le ruban qui m'aveuglait pour tomber sur la vision d'un Plume énervé, excité, décoiffé, aux lèvres rouge sang et au regard interrogateur.

 

-Je crois que ça suffit, je souffle. On a notre réponse. Tu avais raison.

 

Je me redresse et le fait glisser de mes cuisses au sol. Je me penche et dépose un baiser sur sa joue avant de lui lancer un dernier « bonne nuit » et de sortir de la pièce.

 

 

 

Mes pas me conduisent droit vers la chambre, et je sais très bien que j'ai zigzagué tout le trajet tant je suis troublé.

 

Lorsque j'ouvre la porte, le miroir à pied me renvoie une image totalement défaite de ma personne.

 

J'ai oublié mon t(shirt, mon pantalon est à moitié ouvert, mes lèvres tremblent un peu, et je réalise que j'ai à nouveau envie de ses mains sur moi.

 

Je crois que je suis bien dans la merde désormais...

 

 

 

 

 

Par Absynthe - Publié dans : Le Grenat Bleu (Yaoi) - Communauté : Ecritures Sensuelles
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Dimanche 14 novembre 7 14 /11 /Nov 18:38

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Siii! Vous ne rêvez pas! J'y suis arrivée! J'ai réécris ce chapitre qui était tellement parfait avant d'être bouffé par un virus!

Alors forcément, la qualité est moindre, ce sera juste passable, mais j'ai réussi! Bon dieu quelle victoire!

Vu que je suis un peu crevée, je vais zapper l'intro de cinquante ligne habituelle. Juste quelques petites choses:

-Allez lire les défis!

-Essayez d'en faire, qu'on rigole un peu!

-Pensez à faire un tour sur les blogs amis, il y a une petite nouvelle qui mérite d'être lue, et puis plein d'autres que vous devez découvrir ou redécouvrir!

 

candy-homotography-9

{les deux photos sortent de je sais plus quel dossier de travesti sur homotography, je les trouve magnifiques ^^)

 

Si entre deux majs vous êtes trop impatientes, allez lire les DNA, c'est plein d'excuses bidons pour vous faire patienter.

Allez zou ta gueule la créa!

 

Ceci est un chapitre du point de vue d'Ambre, et JE SAIS que les flashs backs ça vous emmerde, moi aussi, je déteste les lire. Mais quand on est "auteur" on aime Aussi causer du passé mystérieux de nos personnages. Alors faites les hypocrites pour une fois, et appréciez =)

Bisous, je vous aime. {Ouai enfin j'aime les quelques survivors qui trainent dans le coin!)

 

Chapitre 17:

 

J’ouvre les yeux sur une salle trouble. Entre fumée et vapeur d’eau, les faibles rayons des flammes dans les bougeoirs paraissent verts, oranges, rouge et or, et chaque particule de lumière se reflète sur les gouttes d’eau, parant la pièce de mille diadèmes aux pierres enchanteresses. Les bassins d’eau chaude et la roche qui les entoure se teintent de mille couleurs chaudes et hypnotisantes. Les corps sont sublimés par le faible éclairage, sculptant chaque défaut comme un bijou dont on se pare sans honte, la sueur et l’eau les fait scintiller, leurs mouvements alourdis par les effluves d’encens sont comme transformés : les muscles se détendent, les gestes des plus nerveux deviennent langoureux, précis, dôtés d’une grâce qu’ici seul ils font preuve.

Mes lèvres s’entre ouvrent et j’aspire une bouffée d’air humide, chaud, et parfumé qui roule sur ma langue. Une goutte de sueur glisse entre mes yeux et je repousse d’une main les cheveux d’un blond trop clair qui obstruent ma vue. Mes doigts se crispent une seconde sur le torse que je pétrissais auparavant. Quelque chose ne va pas. Et ce quelque chose je le connais. Une réminiscence du passé. Pourquoi faudrait-il que cela arrive maintenant que je suis heureux ?

Mon ventre se tord et mon souffle se coupe. Je suis comme trop éveillé à cet instant. Comme si j’étais le seul à avoir une capacité de réflexion accélérée dans la salle.

D’un mouvement je me redresse du rebord de pierre immergé sur lequel mon partenaire et moi somme installés. L’eau glisse sur ma peau et n’atteint plus que mes genoux, pourtant je n’ai pas froid. La verge encore dure de l’homme entre mes jambes retombe contre son ventre, et s’il n’y avait eu l’eau l’entourant, aurait fait un bruit de succion mouillée que j’aurais adoré entendre.

Je lève une jambe et me hisse sur le rebord du bassin lorsqu’une main s’enroule autour de ma cheville.  Je me retourne, enroulant un tissu crème qui parait doré sous la lumière autour de mes hanches, et sens son visage se presser contre la chair de mes mollets ses doigts malaxant ma peau comme l’on apprécierait la fermeté et la douceur d’un fruit, sachant très bien qu’en dessous se trouve le jus le plus sucré qu’il soit.

-Je reviens, je souffle en me détournant et dégageant mes jambes de son emprise.

J’avance de quelques pas, enjambe le corps d’un homme alangui, profitant de la pierre chaude après avoir pris du plaisir, les traces de sa jouissance encore sur son torse, et me baisse pour passer sous l’arche de plantes tropicales qui mènent à une autre partie de la salle de bains. Enfin, j’atteins les lavabos de cuivre,  et m’asperge le visage d’eau fraiche avant de me redresser et d’essuyer la buée matifiant la glace. 

Mes yeux m’apparaissent décalés sur mon visage. Trop gris. Aux iris bien trop grands, aux pupilles pas assez dilatées pour l’obscurité ambiante. Presque argentés. Presque inhumains.

Mon doigt se pose sur ma joue et je me fixe encore.  Presque une anomalie de la nature.

Deux mains chaudes glissent sur ma taille et je laisse tomber ma tête en arrière, sur une épaule que je connais, qui me soutient et m’a toujours soutenu. Sur quelqu’un qui m’a accepté. Comme je suis, comme cette autre espèce à laquelle j’appartiens. Qui me voit.

-Ambre, tout va bien ? La voix d’Indigo se fait rauque à mon oreille, et son souffle saccadé me donne l’idée qu’il a abandonné une activité plus intéressante pour venir me secourir.

-Oui. Je réfléchis, c’est tout.

-Avec la couleur de tes cheveux, tu sais bien que tu ne devrais pas.

Je l’entends rire à sa blague et mon cœur se réchauffe instantanément. Je m’apprête à sourire, mais mes yeux croisent ceux de mon reflet. Vides.

Et soudain tout se brouille tout disparait. Et je revois les mêmes images qu’à chaque fois. Comme si je ne pouvais aller de l’avant sans que ces horreurs se rappellent à moi.

Il fait jour. Les rayons du soleil passent par la fenêtre pour venir frapper la moquette à quelques centimètres d’où je suis assis. Mes doigts s’enfoncent dans l’épais tissu beige sale et je peux le sentir tiédir là ou il est éclairé. Mes jambes encore potelées de l’enfance s’étendent devant moi, de petites chaussettes à motifs entourent mes pieds jusqu’à la moitié de mes mollets. Si petits. Tellement petits. J’ai sept ans. Un livre ouvert repose à mes côtés. Ses grandes images colorées n’ont pour spectateur qu’elles même. Moi, je fixe autre chose.

Dans mon champ de vision, le bas du fauteuil brun paternel. Un cendrier à pied, autour duquel la moquette est grise de cendres perdues. Et les jambes de mon père. Ses pieds enfoncés dans ses épais chaussons bleus, un trou de cigarette dans la couture de celui de son pied droit.

Les jambes nues jusqu’au genou de mon père. Il fait chaud, c’est l’été. Il porte une espèce de bermuda kaki, le genre de vêtement de randonnée, bien confortable. Bien large. Du type qui baille à la moindre occasion et qui ne cache pas grand-chose.  Nous y voilà. D’où je me tiens je vois le bas de ses jambes nues, sa main qui fait des allées et venues entre l’accoudoir, ses lèvres, et le cendrier, et surtout… Surtout…

Cet espace entre son genou et le siège, ce petit espace qui dévoile la peau de sa cuisse mate, qui suggère encore tant de surface de peau à parcourir du regard mais qui s’éclipse de ma vision et s’engouffre dans l’obscurité.

Je l’entends soupirer. Il est fatigué. De plus en plus chaque jour. A cause d’un combat qu’il ne devrait pas avoir à mener. Un combat qui oppose ses sentiments et sa bonté d’homme d’honneur, d’homme droit et de père aimant à ceux, contradictoires qu’il ressent lorsque je suis dans les parages. Sept ans qu’il tient. Cinq ans de souffrance. Je le sais, je le sens. Sa douleur est palpable. Son labeur est sans fin. Il va craquer il est humain. Et plus je le sens, plus inconsciemment je le suis, le harcelant de ma présence innocente comme un chat dans une cuisine alors que le poulet est presque prêt.

Ses doigts tremblent alors qu’il fait tomber sa cendre dans le cendrier. Cinq années qu’il passe à m’écarter des autres hommes. Des collègues, des voisins, des maitres d’école, des réparateurs et des passants. Cinq années qu’il s’éclipse lorsqu’il se sent à bout. Cinq années qu’il revient à temps pour m’extirper des griffes de ma mère impassible alors qu’elle maintient ma tête sous l’eau tandis que je me débats.

Tout ce temps à m’aimer comme le merveilleux père qu’il est et non comme un amant.

Sauf que chaque jour la faim en moi se décuple.  C’est comme une famine. Une douleur sourde avec laquelle j’ai vécu depuis ma naissance et que je ne sais comment satisfaire. Sinon me laisser aller dans la direction que mon corps me montre.

Et pour l’instant, ma main se tend vers ses pieds, mes ongles crissent sur le tissu bleu de ses chaussons, mes doigts ondulent à travers les poils de ses mollets, et remonte… Remonte… Le pli du genou… Le tissu se plisse et…

Et deux jours plus tard, celui que j’appelais « père » se pendait à la tringle du rideau de ma chambre, après m’avoir demandé pardon pendant des heures, écroulé au pied du lit sur lequel je reposais, comblé pour la première fois.

Il n’y a que depuis que je connais Indigo que j’ai saisi toute l’horreur du désir charnel chez un enfant pré pubère. Et encore, je n’arrive pas à ressentir cette répulsion, ce dégoût viscéral dans lequel ont baigné tous ceux qui m’ont approché avant mes quatorze ans.

Et Dieu et Diable savent qu’il y en a eu beaucoup.

Aujourd’hui, je me souviens de la peine que j’ai ressentie à perdre celui qui m’a aimé si longtemps sans me toucher. Le seul, l’unique à m’avoir protégé de tout, même de moi.

Aujourd’hui… Aujourd’hui je me hais au souvenir du premier geste que j’ai fait lorsque j’ai compris qu’il était mort.

Je revois clairement, comme un dessin macabre, ma main si blanche se tendre dans l’obscurité, traverser un rayon de lune qui faisait paraitre la pièce bleue, et tenter d’atteindre cette forme qui tendait le pantalon de son pyjama. Cette érection mortuaire que j’aurais du éclipser de ma mémoire au profit de son visage torturé.

 

Après sa mort je n’eus plus jamais faim. Mais personne ne m’aimât jamais comme lui. D’un amour filial sans que nous n’ayons la moindre parcelle d’ADN en commun. Et chaque jour qui passait me laissait un goût sur la langue, pas un goût amer, une saveur vraiment immonde, comme si toute mon âme se soulevait contre ma nature.

 

Les années défilèrent, entre nuits passées entre les bras de routiers, de mes professeurs, et celles de terreur dans ma propre maison. Personne ne s’était jamais étonné de ma présence dans cette famille. Personne ne s’était jamais posé la moindre foutue question sur le fait que mes parents aient pu donner naissance à un enfant au teint de lune et aux cheveux d’argent alors qu’ils étaient bruns au teint mat.

Le fait que ma sœur ait un mois d’écart avec moi non plus. Chaque fois que le sujet était abordé d’une façon ou d’une autre, les occupants de la pièce se transformaient en poupées. Des poupées automatiques qui soudainement semblaient d’une sérénité à toute épreuve lorsqu’elles changeaient fermement de sujet. Non. Elles ne changeaient pas de sujet, c’était comme s’il était effacé de leurs esprits. Et je restais là, figé, sans comprendre, à prendre entre mes cuisses chaque homme ou jeune garçon qui passait près de moi.

Lorsqu’ils étaient forts, ils fuyaient loin de mon quartier après avoir cédé. Lorsqu’ils avaient un tant soit peu de sens moral, ils se réfugiaient vers l’Eglise, se tuaient ou venaient me revoir pour s’excuser et échouaient. Quoi que l’on puisse croire, les hommes qui couchent avec des enfants ne sont pas si nombreux que ça. Et les quelques uns que j’ai pu croiser ont vite compris qu’entre eux et moi c’était moi le prédateur. Ils étaient ma nourriture, mon moyen de survie, leur plaisir était mien, leur corps était mien, leur jouissance m’appartenait. Et je jubilais de leur visage défait alors que je prenais le dessus et les chevauchais sans hésitation plutôt que de les laisser me prendre comme l’enfant perdu et tordu de douleur que j’aurais du être.

 

Ce fut lorsque j’eus quinze ans que tout changea. Enfin… Que tout évolua.

J’avais depuis longtemps appris à éviter les hommes qui approchaient ma famille, les futurs amants, amis, maris de mes sœurs ou de ma mère. Mais manque de chance pour elles, pour eux, et aussi pour moi, leur présence un peu trop fréquente faisait souvent qu’eux et moi craquions. Et c’est ainsi qu’un jour pluvieux d’avril, je me réveillais enfermé dans le grenier de la maison, glacial, sale, et désespérément vide, comme depuis maintenant vingt jours. Ou vingt cinq. Je ne savais plus.

Mes yeux secs se dirigèrent douloureusement vers le vase que j’avais placé sous la fenêtre pour récupérer l’eau de pluie, et je me trainais jusque là pour boire à grandes gorgées.

Cela faisait une semaine que je m’étonnais de la résistance de mon corps. J’avais compris depuis quelques années que je pouvais tenir deux semaines sans manger sans en mourir, vu le nombre de fois que ma famille m’enfermait dans la cave lorsque je descendais faire mon linge. Et la déception sur leur visage lorsqu’à chaque fois elles ouvraient la porte concurrençait largement mon étonnement d’être en vie.

Bien sur, l’eau était indispensable, mais la nourriture non. Forcément je perdais du poids, mais n’en mourrais pas. Sauf qu’en ce jour d’avril, je sentis que j’avais atteint ma limite. Tout mon corps se tendait désespérément à la recherche d’un contact avec le sexe opposé. Et définitivement non, la masturbation ne comptait pas.

Je me laissais aller à l’agonie, mes muscles parcourus de chocs nerveux. J’allais crever là, comme la dernière des catins enfermée dans un grenier parce qu’elle devient gênante.

Quelle honte. Quelle rage. Et quelle fin de vie ridicule.

La porte était renforcée, les cloisons donnaient sur le toit, et le plancher avait refusé de céder depuis presque un mois. Je ne voyais plus qu’une solution.

Et mon regard se tourna vers le ciel gris qui déversait une pluie froide en continu.

Non, je me fis une raison. Autant mourir là, plutôt que de me vautrer du haut du toit en nourrissant l’espoir de m’en sortir.

 

Mon souffle se faisait erratique.  Faible… et erratique. C’était dur à combiner, et d’autant plus douloureux.

Lorsqu’enfin je laissais mes paupières se fermer, j’entendis sonner à la porte. Une fraction de seconde plus tard mes yeux étaient prêts à sauter de leurs orbites, et mon torse se gonflait d’air.

Des hommes. Plusieurs. Peut-être deux. Non trois.

Mon corps par réflexe se tendit vers la porte du grenier.

« Non… Le toit. »

 

Il doit être quatre heures. Une odeur de thé et d’immondes muffins embaume certainement tout le rez de chaussée.

Sans doute un père et ses deux fils, ou deux amis et le père de l’un deux, ou trois inconnus.

Il est quatre heures, on doit être dimanche, ils sont sans doute assis sur le canapé du salon.

Il est quatre heures, il pleut, et les toits glissent comme s’ils étaient recouverts d’une mousse gorgée d’eau. De la vase peut-être.

Il est quatre heures et putain, le sol était loin.

Maintenant que j’ai le nez dans l’herbe et la terre spongieuse, je le trouve beaucoup trop près.

Je relève la tête et ma nuque semble prête à céder. Je regarde à gauche, à droite. L’abri du jardin est plus près que la porte d’entrée.

Mes muscles se tendent une seconde et je m’écroule. Ramper, c’est pas si mal en fait. Ma cheville me fait un mal de chien.

Une demi heure passe. Je suis couvert de boue. L’abri n’est plus qu’à un mètre et la pelouse devrait être tondue. J’entends un claquement de porte et une délicieuse odeur vient à moi.

Enfin.

Je roule sur le dos et relève légèrement la tête. Ils sont trois, sortis fumer le cigare du dimanche.

La fumée disparait entre les gouttes d’eau tandis qu’ils se serrent sous le porche pour éviter la pluie.

Des rires gras résonnent . Qu’ils tournent le regard par ici !

Je me sens défaillir et lorsque mes yeux se r’ouvrent, c’est pour tomber nez à nez avec mes sauveurs.

-Eh là gamin ! Ouvre les yeux !

J’étais sauvé. Et à peine l’un eut touché ma peau que je me sentais revivre et mes jambes s’enroulaient  autour de ses hanches comme un étau. Mais ce n’était pas assez, il me les fallait tous. Tout les trois. Peut importe qui ils étaient, à quoi ils ressemblaient. Ce qu’ils voulaient à cet instant c’était moi, et uniquement moi, et ça parce que je le voulais.

Nous fûmes pris sur le fait. Une petite demi heure plus tard. Assez longue pour que je gise allongé sur la terre meuble, comblé, comme un amateur de gastronomie après un repas dans un quatre étoiles. Mes jambes pleines de foutre et de boue étaient légèrement repliées, écartées sans gène et un liquide chaud et poisseux glissait de ma joue à mon cou.

Mon cerveau était abruti par la satiété. Aussi je ne m’aperçus du changement de partenaires que lorsqu’un marteau entra en contact avec ma bouche. Ma tête vola littéralement en arrière et le hurlement de douleur que je voulus pousser fut coupé par le vomissement de sang qui émergea de mes lèvres. Je roulais sur le ventre et laissais ma bouche béer tandis que dents, salive et sang glissaient tristement sur la terre de la cabane. La douleur était si diffuse dans mon visage que les larmes obstruaient ma vue sans que j’eusse la moindre intention de pleurer.

Mes ongles s’enfoncèrent dans le sol et enfin le cri de souffrance retenu par mes hoquets put sortir.

Long, rauque, presque animal. Le genre de cri d’agonie qui me hante encore aujourd’hui alors que c’est moi qui l’ai poussé.

Un haut le cœur me pris lorsque le pied de ma mère s’enfonça dans mes côtes, puis dans mon ventre, et les poings de mes sœurs dans mon visage.

Folles. Ce fut le seul mot qui me vint à l’esprit. Elles par contre eurent tout le temps de me qualifier de monstre, de bête, de démon, de chienne et de faire trois fois le tour du dictionnaire avant de me lâcher et de se diriger vers un seau d’eau pour se nettoyer. Otant le sang de leur visage avec la délicatesse d’une future mariée nerveuse et apprêtée. Les cols furent remis en place, les chemises lissées, de charmants gloussements se firent entendre et leurs pas joyeux et insouciants s’éloignèrent de la cabane. Je compris que j’étais devant le même phénomène que l’attrait qu’éprouvaient les hommes pour moi, et la béatitude dont faisaient preuve ceux qui relevaient l’étrangeté de mon existence.

J’ouvrais les yeux sur un abri vide. Ca devait être la huitième fois que je défaillais aujourd’hui.

J’étais sur le ventre, et je repliais mes genoux sous moi pour me redresser. Une douleur fulgurante traversa mon corps du bas de mes reins jusqu’à ma nuque et je serrais les dents. Ou plutôt j’essayais et les moignons encore présents dans ma bouche s’entrechoquèrent avec mes gencives en lambeaux.

« Hie he herhe huhin ». Ce que j’avais voulu dire c’était « vie de merde, putain ». Je me redressais sur mes jambes tremblantes et baissais les yeux vers mes cuisses maculées de boue et de sang séché. A peine l’eus je pensé que de nouvelles coulées d’un rouge plus vif s’ajoutèrent au dernières et ma main partit entre mes fesses retirer un petit quelque chose qui n’aurait pas du y être.

Une vis. Sans déconner. Je fixais l’objet à la lumière d’un rayon de réverbère qui pénétrait dans la cabane. J’étais sceptique. La douleur était terrible. Et si elles s’étaient amusées à me torturer pendant mon inconscience,  je devinais que je devais être dans le pire des états. Il n’y avait plus qu’à espérer que ce qui avait décidé que j’attirerais les hommes, rendrait les femmes pleines de haine avait prévu un petit quelque chose pour la résistance à l’hémorragie.

Une heure plus tard, je me trainais le long d’une route en direction d’un arrêt de bus. Oh bien sur je marchais. Mais à la vitesse d’un vieillard boiteux. Voire pire.

Je m’approchais de l’abribus et distinguais une autre silhouette avachie sur le banc, un gros sac à ses pieds. La lumière du néon clignotant me fit apercevoir des cheveux d’un châtain lumineux, un teint doré comme celui d’un surfeur, et surtout, une aiguille plantée dans un avant bras, juste avant que le jeune homme ne me remarque. Je m’affalais contre la vitre et contemplais rapidement mon reflet. A part avoir l’air de m’être fait tabasser, j’avais l’air plutôt normal. Pas trop de sang.

Lorsqu’il me vit, il fit un bond en arrière, se plaquant contre le coin de l’abribus, s’emmêlant les pieds dans son sac. Je tournais des yeux interrogateurs vers lui et le vis appuyer sa tête contre la vitre pour lever les yeux au ciel et se répéter comme un mantra.

-C’est un humain. Ca n’existe pas. Ca n’existe pas. Normal. Humain. Tout va bien. Humain. Hum…

J’étais intrigué, c’était une des premières fois que quelqu’un semblait avoir peur de moi. J’avais vu des hommes étonnés, attirés, dégoûtés, mais jamais effrayés.

Je me tournais à nouveau vers la vitre. Non, à part deux cocards en formation j’avais l’air tout à fait normal. Mon absence de dentition ne se voyait pas, j’avais la bouche fermée. Je ne comprenais pas.

Je me recoiffais et me déplaçais de quelques pas, pour me mettre dans son champ de vision. Ca a toujours marché. Toujours. Les coups et la faim n’ont jamais altéré le pouvoir que j’exerçais sur les hommes.

La seringue tomba au sol et il poussa un soupir. Je continuais de l’observer et les secondes passant il se détendit.

…Pour finir par se mettre à rire d’un rire de personne défoncée, terriblement à l’ouest. Il pointa son doigt vers moi et l’agita négativement alors que je le fixais, de plus en plus agacé.

-Nan nan, nan mon petit. Tu ne m’auras pas. Je te vois. Je te vois, et maintenant que je suis au 7ème, je peux le dire sans passer pour un fou. Je sais ce que tu es. Je te vois. Et tu ne m’auras pas.

Je me laissais tomber au sol, ébahi. Il ne se passait rien. Il n’éprouvait ni intérêt ni désir. Rien.

Il savait ce que j’étais alors que moi-même je l’ignorais.

Je venais de rencontrer Indigo.

Et il me voyait.

Par Absynthe - Publié dans : Le Grenat Bleu (Yaoi) - Communauté : Plaisir mutuel sans limite
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