Pure Vengeance (Finie)

Jeudi 18 septembre 4 18 /09 /Sep 23:44

Un toussotement interrompit  notre  échange  buccal approfondi. Je  constatais avec  un amusement  non dissimulé qu’un grand  nombre  de mes  stylos, carnets, papiers  et  dossiers étaient  tombés sur  le  carrelage  immaculé du cabinet  d’autopsie.

Sans  séparer mon corps  de  celui de  mon aimé  je  me  penchais  un peu plus  sur  lui, saisissant  une boite  de  gants en plastique  stérilisés qui se  trouvait loin derrière lui.

Aussi nous nous retrouvions à moitié  allongés sur  le  bureau sous  le  regard  hébété du dénommé  Carlos.

Stef  semblait  lui aussi amusé de la situation, et gardait  les mains  posées  sur  ma  taille glissant  délibérément plus bas sur  le  tissus. Je me redressais  à peine et enfilais les  gants avec  une  lenteur calculée, glissant  un à un mes doigts dans  les emplacements qui leur  étaient réservés sans  quitter  le regard  du preux inspecteur.

Un glapissement  étouffé  se  fit  entendre  derrière  nous. Pauvre  petit  Carlos, il est tombé  au milieu d’un duel de  géants. Je  me retournais  finalement  vers  le  corps pour approfondir l’autopsie.

Je passais  mes doigts  dans  le sang et  la  masse  informe  que représentait  à présent le visage et le crâne  de mon premier.

 –Comme  vous pouvez l’observer le  visage  a été  totalement  détruit  à partir  des arcades  sourcilières jusqu’au sommet du crâne. Mes doigts  courent le long des  impacts. Il y a  eu un premier  coup ici. Mes  mains  pénètrent dans la chair, creusant  la peau détachée  pour  mettre  à jour la  forme  de  la pierre.

C’était  un coup hésitant  apparemment, il est le moins  puissant. Sûrement du à une colère  extrêmement  puissante surmonté  par  une  culpabilité naissante. Ce  qui veut  dire  que cette  personne a  soit  été  déstabilisée par  un évènement  extérieur  comme  l’arrivée  d’un témoin, ce  qui n’est pas  le  cas, soit  par  une hésitation personnelle, un combat  intérieur. Bon bien entendu c’est à vous de  choisir, je  ne  suis  ni psy, ni profiler.

Le meurtrier a attaqué  sur  le  côté, et  non par  derrière  comme  on pourrait le croire au vu de  l’état  de  sa  tête. Deux conclusions  possibles, soit  un courage  démesuré, soit  une  folie  incommensurable.

Le  second  coup a vraisemblablement été  porté  juste  au dessus  alors  que  la  victime  s’affaissait  sous la  douleur. Les  quatre  autres  ont  été  portés  une  fois  l’homme  à terre. A  ces  mots  je tournais  la  tête  de  la  victime  sur  le  côté  d’un mouvement  sec. Exposant  l’arrière  du crâne  à la vue des  deux  hommes.

Il y a  eu quatre  tassements  de l’os successifs suite  aux  coups et à la  force  mise  en jeu.

Je me lève et  me dirige  vers  des  radiographies, faisant  asseoir Stef  sur  un siège et  glissant lascivement  mes mains autour  de  ses épaules, et  sur  son torse.

Déjà annotées les  radios  montrent les  ondes  de  chocs et  de  fracture de la boite  crânienne.

 –Conclusion mademoiselle ? Me demande  Carlos avec  impatience.

Je me baisse  légèrement vers Stef, humant  son odeur rafraîchissante et  apaisante au milieu de  tous ces cadavres.

Conclusion, j’enfouis mon visage  dans  son cou et  commence  à lécher sa  peau avec délectation, le  meurtrier  est certainement  féminin, ne  dépassant pas  le  mètre  soixante-dix, et  doit  peser  entre  cinquante et  soixante  kilos s’il est en santé  normale, et a une musculature classique.

Je  recommence mes  baisers, ignorant le regard de  braise  que pose  Carlos  sur  moi en ce  moment.

Je sens Stef  se  tendre et je le vois se redresser, foudroyant son employé du regard.

Nous en avons fini ici, Carlos tu peux  m’attendre dehors. J’arrive.

Une fois  le policier  sortit  j’ignore mon amant, le  laissant  seul devant  le  bureau, et  m’affaire  à rattacher certains  lambeaux  de  peau ouverts  pour l’autopsie. Des  mains  se  posent  une  nouvelle  fois sur  mes  hanches, et  je sens un corps  chaud  se  serrer  contre  moi.

Je  me  retourne et  murmure, acerbe :

-Alors  mon petit poulet, tu ne m’en veux plus ?

–Parle  moi sur  un autre  ton Ley… marmonne-il feignant  l’indifférence.

 –Sur  un autre ton ? Non tu ne  le  mérites pas. Si t’es pas  content barre  toi. Ca me  fait  halluciner ça, les  petits  flics  dans  ton genre  qui sont  capable d’en vouloir  à une  personne  parce  qu’elle  a eu peur.

–Tu sais  autant que moi que ça n’a rien à voir avec mon boulot Ley tu es chiante.

– He ben je n’aime PAS ton boulot, je  siffle  entre mes dents avec  un regard  mauvais tout en m’approchant de  ses lèvres, et  j’aime  PAS ton comportement vis  à vis de  moi.

Il s’approche encore  plus ostensiblement de moi :

-J’aime  pas  le tiens non plus t’inquiètes pas. T’es la  pire  merdeuse  indécise et  égoïste  que je connaisse.

A ces mots il m’embrasse  avec  violence, forçant le barrage de mes  lèvres, me serrant  contre  lui à m’en étouffer. Je le repousse contre un brancard vide, et réplique avant  de mordre sa  lèvre  jusqu’au sang :

-Toi t’es le  pire  connard, le  plus  vulgaire et  le  plus chiant des  hommes  que  j’ai connu !

–Putain comme  je t’aime…

-Je t’aime  aussi maintenant dégage ! 

Je le regarde  partir, les  cheveux en bataille, haletante  au milieu de  mes chers cadavres, une  lueur de folie  dans le regard.

Je  suis  amoureuse. D'un flic, d'un abruti.

Mais  bon dieu comme  je  l'aime!

Je  me  retourne  vers  mon Premier, toujours  là, allongé  comme  un con, la  gueule fracassée à coups  de  brique.

Je  me  penche vers  lui, et  murmure  à quelques  centimètres de son ancienne belle  gueule:

-Jt'en foutrais  moi des  premières fois de  ce genre. Petit  con. Tu fais moins le  fier  là hein?

Ho que  oui t'as  l'air  d'un débile. Regarde  moi ça... Tu ne  vaux  rien, t'as  jamais  rien vallu. Et  maintenant, tu vaux encore  moins depuis que  j'ai croisé  Stef. Crétin...

Par Absynthe - Publié dans : Pure Vengeance (Finie)
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Jeudi 18 septembre 4 18 /09 /Sep 23:50

Je sors de la morgue rapidement, l’adrénaline en moi n’est pas encore descendue et si j’hésite ne serait-ce qu’une seconde je réquisitionnais le bâtiment pour quelques heures, moi et Ley seulement…oula je me perds ! J’entends Carlos klaxonner pour que je me dépêche et c’est dans la tranquillité que je rentre dans la voiture de police.

C’est fou ce qu’en quelques heures je peux la détester autant que je l’aime. Elle a ce pouvoir sur moi qu’elle va sans doute exercer encore quelques semaines, mois ou peut être années qui sait, l’amour nous laisse bien dans le doute aussi longtemps que l’homme respire.

Je pousse brusquement les portes du commissariat, les agents sursautent, certains ne cillent même plus un mouvement ayant l’habitude de ma mauvaise humeur seulement j’arbore cette fois un sourire colgate ! J’ai jamais été aussi heureux de ma vie.

En fait si je le serai sûrement quand je lui demanderai de partager ma vie à jamais, quand elle devra faire le choix entre notre schizophrénie commune et une vie heureuse qu’on sera prêt à accepter, qu’on pourra enfin se délivrer de cette dépendance à la douleur et à souffrir avec l’autre. Quoi qu’on en dise ça serai un choix très dur, comme un drogué dépendant de sa dose devra décider de faire une cure et de vivre normalement.

Oui ce jour là je serai le plus heureux des hommes.

Je m’assois tranquillement sur mon fauteuil tourne le siège pour me mettre devant la fenêtre ou les rayons du soleil sont découpés en tranches par des stores. Je regarde le ciel, pensif, j’essaye d’imaginer ma vie à ses côtés heureux, plein de vie ! Et qui sait…peut être que nous ne serons pas seuls.

Je ne peux pas m’empêcher de rêver comme un adolescent, est-ce mon côtés en manque d’amour qui ressort ? Est-ce qu’elle à réveiller en moi la sensibilité qu’on avait piétiné et écrasé depuis mon enfance ? Je ne sais pas. En tout cas, j’aimerai vraiment que ce rêve se réalise car dedans, je ne vois pas de sang des victimes tâcher notre tableau blanc.

Mais avant tout ! Avant d’être heureux, avant de pouvoir sourire à ses côtés et la faire virevolter dans les airs en tant que Madame Meryl, je dois me débarrasser de mes démons.

L’assassin doit tomber.

J’attrape les photos et le dossier de la dernière victime. Adrien Holbein, vingt six ans, jeune propriétaire d’une grande villa dans le quartier résidentiel du Sud. Ses parents sont avocats tous les deux mais ils avaient coupé définitivement les ponts avec leur fils qui était devenus un débauché enchaînant fille sur fille et parfois même des garçons, il y a de ça trois ans. Je regarde les photos de son crâne décomposé, j’essaye d’analyser la scène, l’esprit de l’assassin.

Quelques chose cloche.

Oui il manque quelques, j’ai l’impression que…que rien ! Je ne remarque rien ! Comme si je portais des lunettes noires qui m’aveuglaient. Je ne voyais plus rien !

Les photos étaient là devant moi, son crâne éclaté, le sang séché sur les cheveux mais rien ! Je ne ressentais rien ! Pas la moindre idée ! Pas la moindre piste !

Je crois que…Oui…je crois que je n’ai plus aucun instinct ! J’ai perdu mon talent, je ne sais plus analyser une scène de crime ! Je n’ai plus rien ! Je crois même que j’ai perdu mon désir de vengeance. Le seul visage que j’aperçois c’est celui de Ley. Qu’est-ce que ça veut dire ? Qu’elle m’a aveuglé ? Qu’elle a pris tous mes sentiments ? Elle m’a enlevé le visage de Jim et le désir de le venger.

Je ne comprends plus rien, impossible de me concentrer lorsque j’essaye d’imaginer la criminelle rien ne me vient. Juste son regard, son sourire, ses lèvres, sa peau douce.

Rien.

Je sors du bureau, anesthésié, le prix du bonheur a été l’envie de tout autre chose et l’avenir me frappait au visage comme un vent gléné. Si jamais elle venait à me quitter que me resterait-il ?

- Ça ne va pas Stef ? Me demande Marissa

- Je…, je regarde Marissa complètement à l’ouest

- Vous voulez que j’appelle un médecin Inspecteur ? Me demande ma secrétaire

- Non pas la peine.

Je pars les laissant seuls dans leur doute. Encore perdu dans ma maladie, je prend peu à peu conscience qu’à part elle plus rien n’a de sens ! Qu’à part son sourire tout le reste est fade et sans importance !

Je me rend compte que je ne suis plus rien, une coquille vide, elle m’a volé mon cœur.

C’est plutôt romantique dans un sens mais d’un autre je trouve cette perspective effrayante car pour la première fois de ma vie j’ai peur de ne plus savoir qui je suis, ne plus savoir vivre si elle disparaissait.

Sans me rendre compte, perdu dans mes réflexion, je me retrouvais dans ce petit quartier, devant une grande bâtisse.

Est elle en haut ?

Par Absynthe - Publié dans : Pure Vengeance (Finie)
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Vendredi 19 septembre 5 19 /09 /Sep 00:01

Ce vieux toit pourri a  vu défiler  toute  ma vie. A défaut  d’un véritable  homme  j’ai un toit. Magnifique.

Un toit, une belle  vue, et  un cœur  brisé. Les  larmes  défilent  sur  mes joues, rendues glacées par le vent.

Cela fait des  heures  que  je  suis là, debout, appuyée sur la seule et unique rambarde de ce fichu toit.

Je  finirais  peut-être ma vie  dessus… Qui sait.

Je n’en peux plus  de  pleurer, pourtant  je  ne peux pas  m’arrêter. Je suis  un monstre. Il est un monstre.

 

Non. Il est mon Dieu.

Je  revois le  visage  de  Carlos, mi-inquiet mi-tendre lorsqu’il me l’a  annoncé. Quelques  secondes  après que  Stef  soit  remonté, Carlos est  venu me  trouver, il avait  oublié  son portable  sur  l’un des  bureaux. Tu parles. Je  ne  suis pas  forcément  une  lumière, mais  le  coup du portable  oublié ça  sent l’excuse  merdique.

Pour  qui me  prends  tu misérable  flic ?

Je  suis celle  que  vous  cherchez  depuis  des  jours  et  des  jours. Celle  qui vous  mène en bateau depuis le début… Celle  qui vient  de  découvrir que l’homme qu’elle aime est celui qui veut  la  mettre  derrière les barreaux.

Mais  allons, je  continuais de jouer la  gentille légiste, acide et froide et  lui lançait  un coup d’œil en biais. Parlant  assez  fort  pour  qu’il l’entende alors que j’avais les mains  plongées dans le sang d’un de  mes  patients :

« Quand  on a pas de  neurones  on a  des jambes. Et  là, vu la  taille  des  tiennes ça doit  être  le  vide  intersidéral dans ta tête mon gros ».

Gamin. Vanne  pré pubère, mais  qu’est-ce que ça soulage de sortir des niaiseries de ce genre là. Je sais  qu’il l’a  entendu.

N’importe  qui se  serait  vexé, énervé, et  m’aurait  insulté avant de se faire rabattre le caquet par une réplique cinglante. Mais  lui non. Trop gentil je  crois.

Faible ?

Peut-être pas. Gentil oui. Ca doit  être  sa  force  à lui.

Je  l’ai sentit  s’approcher de moi et s’arrêter à quelques pas :

-Mademoiselle ?

Je  me  sens  faible  d’un coup. Il se moque de  moi. Gentil. Gentil. Gentil. Poli, sympathique. Rah ! Si je  pouvais  je  me fracasserai le  front  sur  ce  qui se  trouve  devant  moi.

Manque  de bol, là c’est mou, sanglant et mort. De  quoi faire  passer  certaines  pulsions.

Vous êtes  encore là ? L’inspecteur doit vous attendre, il ne  faut pas oublier  qu’il a  une  vilaine  meurtrière  à mettre  derrière les  verrous !

Je me  retourne lentement au fil de ma tirade, les  yeux fixes, les mains pleines de sang. Je  penche légèrement la tête sur le côté, et étire  un semi sourire plus que glacial.

Justement. Vous  semblez… Proches tous les  deux. Je sais que je ne devrais pas vous en parler. Mais je  n’ai jamais  vu l’inspecteur avec une femme de votre trempe auparavant. Donc je me dis qu’il doit y avoir  plus  qu’une  histoire de  cul entre  vous.

Je cligne des  yeux, l’air toujours  impassible. Je le fixe, cet  abruti marque  une  belle  pause dans sa tirade, de quoi installer le suspense et être sur que je suis à l’écoute. Allez crétin, je n’ai pas que ça à faire… Il inspire calmement :

-J’aimerais que vous preniez soin de lui. Il vit  une  période difficile. Et  l’affaire sur laquelle nous sommes est de loin celle  qui le  touche le  plus. Son meilleur ami fait partie des victimes.

Mes  yeux s’écarquillent de stupeur. Pas  ça…  

-Le  tout premier mort. C’était la  seule personne qui le  rendait humain. La seule personne à qui il se  livrait. C’était  son ange  gardien en quelques sortes. Et  cet ange s’est fait  buter  par une folle dingue en mal d’amour. Vous vous  en rendez  compte ?! Vous comprenez ce  que je dis ? Il ne reste plus que vous désormais… Faites  attention à lui je  vous en prie. Il est fragile, il a un cœur d’or caché derrière sa froideur et sa folie.

Je  murmure  pour  moi-même  en me tournant vers  mon cadavre :

-Et  moi la folie planquée derrière un cœur d’or…

-Mademoiselle ?

Je lui fais  un vague geste de  la  main :

-Vous connaissez la sortie. N’oubliez pas votre veste sur le dossier de ma chaise cette fois…

J’entends  un hoquet  stupéfait, oui je suis dos  à lui, oui je suis  dos  à cette  chaise, mais je ne suis pas sourde.

Il s’éloigne et remonte  à la  lueur du jour. Quant  à moi je  reste  là, entourée de  mes  morts, mes  proies, mes  amours. Je me glisse dans une seconde chambre froide et m’approche d’une  civière, retirant le drap je me penche vers Jim.

Enfin ce  qu’il en reste.

Ange ? Ange déchu. Je t’ai coupé les  ailes. Et  j’ai coupé le filin qui maintenait la joie de  vivre de  celui que  j’aime par la même  occasion. Je te hais Jim ! Je te hais de tout mon cœur et toute mon âme. Si tu n’avais  pas  été  un salaud mon véritable  amour  ne serait pas  perdu désormais…

 

Je  cligne  des yeux, je  suis  sur  le  toit.

Mes  larmes se sont arrêtées. Je me suis  promis  de  tuer  celui qui t’a rendu si malheureux  Stef. Je  me le suis promis.

Je m’avance doucement vers le bord de l’immeuble.

La  pointe de mes  pieds est déjà dans le vide. Mon cœur s’emballe. Je ne veux pas mourir. Quelque chose dans mon ventre  me retient.

Quelque chose dans ma tête me hurle de ne pas le faire…

 

Pourtant…
Par Absynthe - Publié dans : Pure Vengeance (Finie)
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