Dimanche 29 novembre 7 29 /11 /Nov 21:03


Bonsoir bonsoir! Vous vous souvenez de moi?
Comment ça non? >___<"
Bref.
Ce soir je vous publie un OS que j'ai enfin terminé, et dont la fin sonne le glas de mon absence. (Comme c'est bien dit, un vrai auteur hein..) (c'était ironique. Patates).
Bref, un Os intitulé Mozambique, qui aurait du faire 500 lignes et qui fait en réalité vingt trois pages. Haha.
Bien entendu, vu qu'il n'a pas encore été jugé par Angenoire la juge de ce duel (un écrivain d'histoires sims hétéros je crois, peut-être que vous connaissez) je lui ai d'abord demandé son accord avant de publier.
Soit dit en passant tout ceci s'est déroulé sur le formidable Quatre Mots Sur un Papier (voir lien à droite), forum sur lequel vous trouverez des duels, des concours, des histoires à plusieurs mains, des concours design etc etc.
(Haha je me fais l'effet du présentateur blasé qui récite sur un ton monocorde "Olalala, quelle folie sur le terrain, les joueurs sont en forme olympique ce soir. Mais ils le seraient encore plus s'ils avaient goûté au hot dog de Ernie la Saucisse situé au niveau de la quatrième tribune. Voilà, celui qui fait coucou là. Bien. Olalala mais que vois-je?. Parker vient de tacler Brandon! C'EST DU GOLFE PAS DU CATCH BANDE DE SALIGAUDS!" etc. Heu... Pardon.)
Oui donc.
La fin est plus ou moins baclée... Enfin si elle l'est carrément en fait. Il fallait absolument que je m'en débarasse je pouvais plus le voir ce texte xD
On sentira rapidemet le manque d'enthousiasme dans l'écriture...
Mais bon. Je le publie quand même au cas ou quelques courageuses voudraient se lancer dans la lecture ^^.
Notez bien que ej ne demande rien hein xD

Mais quand même, elle avait du potentiel st'histoire.
Comme d'hab, pas de suite de prévue. Par contre Vous vous pouvez la reprendre!

Ah et comme image (d'ailleurs je la collerai sur un paquet d'autres articles il est canon ce mec) Baptiste Giabiconi, l'égérie de Lagerfeld. Sans déconner... Vous connaissez un mec qui peut être sexy avec des tire chaussettes? xD?

Oui donc trêve de conneries:
Sujet:
Pour cet été vous avez décidé de faire quelque chose d'original et d'insensé. Vous êtes la fille ou le fils de quelqu'un de très riche et pouvez par conséquent faire tout ce que vous voulez. Ayant entendu parler de la découverte d'une nouvelle forêt jusqu'à là inexplorée vous décidez de vous y rendre. Le lieu étant inexploré, vous louez pour l'occasion un hélicoptère.
(information sur la dite forêt ici:
http://www.paperblog.fr/1460429/google-earthdecouverte-dune-foret-vierge-au-mozambique/ )

Vous faites cette aventure avec vos amis. Mais cela va très vite virer au cauchemar, n'ayant aucun sens de l'orientation, vous allez vous perdre. Vous découvrirez ainsi la végétation et la faune locale. Racontez ce que vous ressentez, vos tentatives pour vous en sortir, vos disputes, plans... Au bout de la deuxième nuit un de vos amis aura un accident ( mortel ou non). Décrivez la scène. Sentiment de peur, de colère..
(dispute entre amis, histoire d'amours... toute sorte de relation est possible, même un meurtre )

Consignes: Minimum 100 lignes, maximum: 500 Lignes. Taille 11, times new roman.
Vous pouvez écrire à la première ou troisième personne. Vous devrez décrire autant les sentiments de votre ou vos personnage(s) que la nouvelle forêt. Attention rien de surnaturel, les nouvelles plantes voir nouveaux animaux découverts doivent pouvoir exister. Donc pas de plante bleue ou d'araignées mutantes. Tout doit être plausible. Cependant n'oubliez pas de faire preuve d'originalité, évitez les clichés!
On doit aussi pouvoir rentrer dans la tête de la personne et pouvoir partager ses craintes, son étonnement ou la fascination qu'il éprouve.

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Mozambique:

Voilà deux heures que notre hélicoptère survolait la région de Zambézie au Mozambique.
-Zambèze quand tu veux chéri!
-Ah la ferme!
Deux heures que nous avions quitté Alto Molocué en pleine nuit pour atteindre le mont Mabu au petit matin. A ma gauche, le pilote marmonnait en un mélange de portugais et de Shona, donnant un résultat plutôt incompréhensible que j’ignorais fermement. Déjà que cet idiot avait refusé de me laisser l’hélico pour la semaine alors que j’ai mon permis de vol et de l’argent à profusion…
Je claquais la langue d’agacement et il plissa les lèvres, cessant son bourdonnement agaçant dans le micro des casques. Ce voyage commençait définitivement… bien.
Derrière moi, Ellie et Cameron plaisantaient et faisaient blague sur blague depuis notre départ, ignorant totalement le jeune homme juste à côté d’eux.
Luz, un des boursiers de notre faculté, qui gardait le nez plongé dans les captures d’écran de Google Earth qu’il avait fait rapidement avant le départ.
En fait, lorsque Cameron a vu qu’une forêt réellement vierge avait été découverte grâce au moteur de recherche satellitaire, on a tous décidé de décommander nos vacances sur je ne sais plus quelle île paradisiaque au profit d’une expédition dans le monde sauvage et intouché.
Mais bien entendu, il nous fallait un guide… Enfin un con qui regarderait les cartes et qui nous dirigerait dans la forêt pendant que nous nous fendrions la poire à courir après des vaches à cinq pattes.
-Hé le pauvre, tu veux pas profiter du paysage plutôt que de jouer le rat de labo encore trois plombes?
Ça c’est Ellie. Ellie, le phénomène national. Ex-copine de shopping de la sœur de Paris Hilton. Si, si. Mais disons que Paris et sa sœur sont de grosses paysannes vulgaires et sans style face à Ellie.
-Je suis en fac de biologie Ellie. Je suis boursier, je ne passe pas mes exams grâce au nom de mon père, donc je SUIS forcément un rat de laboratoire.
-Mais qu’est-ce qu’il est lourd ce mec! Pourquoi tu l’as embarqué déjà?
Je soupirais et jetait un coup d’œil à l’horizon qui rougeoyait doucement en croisant les jambes.
-Par nécessité, et puis parce que je ne pouvais pas laisser quelqu’un qui nous côtoie toute l’année aller passer deux mois d’été dans un mac Donald. Tu comprends, nuisance olfactive. J’ai pas envie de passer le semestre prochain à froncer le nez à cause de son odeur.
-Va te faire foutre Connor.
Et voilà. J’avais fâché Luz et fait plaisir à Ellie. Cette petite perle adore que l’on rabaisse les autres devant elle. Une sorte de passion comme certains ont le golfe et d’autres le macramé.
Quelques minutes passèrent, j’entendais Ellie et Cam faire les cons à l’arrière, et le pilote ne cessait de se retourner avec un regard pseudo menaçant, avant de reprendre vivement le contrôle de l’appareil, faisant ainsi quelques embardées qui perturbaient le Pauvre et faisaient mourir de rire mes amis héritiers.
Mais soudain j’eus la plus belle vision de ma vie et oubliant les ricanements dans les écouteurs, je demeurais bouche bée devant le soleil qui pointait à l‘horizon, reflétant ses couleurs rougeoyantes sur les steppes, prairies et forêts, illuminant le paysage de mille nuances enchanteresses…
-Un soleil rouge se lève, beaucoup de sang a du couler cette nuit…
-Ahh Cameron tais toi!
…oui enfin je ne restais immobile qu’une seconde grâce au commentaire définitivement pertinent de mon meilleur ami.
Pour le coup, même Luz avait sorti la tête de son c… de ses feuillets, et je dois avouer qu’étonnement cela me réjouissais. Un peu hein. J’apprécie pas la présence du peuple.
-Mon dieu j’ai jamais rien vu d’aussi beau, s’exclama Ellie en se penchant entre les sièges avant et en faisant râler le pilote.
-…A part peut-être le dernier sac à main Vuiton… Ou les escarpins Gucci… Ou…
-Ouai enfin au final ce n’est qu’une putain d’aurore!
-Ah mais je ne parlais pas d’aurore Cam’, je parlais de la magnifique forêt vierge juste là en bas, celle dans laquelle on va s’éclater comme des malades pendant deux semainnnnes!
La fin de sa phrase était partie dans des aigus hystériques, chose que l’on entend que très rarement chez une dame de la haute, mais aucun n’y prêta attention plus de quelques fractions de secondes parce qu’ensuite, nous étions tous sans exception face collée à nos fenêtres respectives, les bras ballants et tout commentaire oublié.
En dessous de nous s’étendait le plus magnifique parterre d’arbres que je n’avais jamais vu.
En réalité les termes « Arbres » ou « Forêt » étaient bien trop faibles pour qualifier le véritable oasis de verdure qui prenait subitement pied sur tout une montagne…
Quatre-vingt kilomètres carré rien que pour nous!
Magnifique n’entrait pas non plus dans les adjectifs qui pourraient qualifier la forêt.
Majestueuse. C’était plus correct.
L’hélicoptère amorçait la descente, et le pilote fit signe qu’il ne pourrait pas se poser entièrement, donc qu’il faudrait sauter un peu.
Luz fut le premier à balancer son paquetage et à bondir en faisant un signe d’au revoir au moustachu concentré sur sa manœuvre.
Tandis qu’Ellie piaillait sur la hauteur, et que Cameron tentait de récupérer son Ipod perdu sous un siège, je rappelais en portugais les dates d'approvisionnement ainsi que la date de retour à l’homme, qui continuait de marmonner d’agacement, et qui me fit un hochement de tête affirmatif. Il avait compris. Et vu la thune que je lui promettais, il ne nous oublierait pas.
Lorsqu’enfin je m’apprêtais à mettre pied à terre, je l’entendis râler sur « Ces putains d’anglais », et j’atterrissais au sol juste à temps pour me retourner et hurler:
-Américains connard!! On est des putains d’américains!
Le vrombissement de l’appareil couvrit en partie mes hurlements, et je me baissais légèrement le temps qu’il s’éloigne et cesse de remuer la poussière.
-Ouai enfin l’immigré est mexicain hein, finit par dire Ellie en s’approchant de moi, hissant son sac à dos sur ses épaules.
-L’immigré est plus américain que toi la Canadienne, répliqua Luz en secouant sa carte verte d’un air narquois.
Je vis la jolie blonde rougir de rage, il ne fallait jamais évoquer son demi sang Canadien, c’était la honte suprême pour elle.
-Ferme la le parasite! S’agaça Cameron.
Ça c’était bas… Mais… C’était bon.
Venant de Cam’ ça craignait un peu en vérité, son père était le directeur des douanes du Mexique et des US, et il faisait la guerre aux clandestins, si bien que n’importe quel basané était forcément une nuisance à ses yeux. Et bien que Cameron ne soit pas si extrême, il gardait quelques réflexions étranges qui jaillissaient parfois et jetaient un froid sur les conversations.
Il y eut un silence et nous nous retournâmes vers notre lieu de vacances. Pour garder encore un peu notre mutisme presque religieux.
Quand j’avais dit « Majestueuse », j’avais vraiment trouvé le bon mot.
Sous nos pieds la terre était dorée, sèche, parsemée de buissons brûlés par le soleil, elle avait presque la texture du sable.
Mais plus nos yeux s’égaraient vers l’orée du bois, plus la terre fonçait et s’humidifiait.
Un courant d’air glissa d’entre les arbres jusqu’à nous, portant en lui une odeur de vieille humidité, de feuilles tombées ainsi que de fleurs rares et nous plissâmes imperceptiblement les yeux pour apprécier cet air unique au monde.
La séparation entre la terre du Mozambique et la forêt vierge était impressionnante. Ce changement de faune, de flore, et surtout les pieds des arbres si serrés les uns contre les autres qu’ils formaient une muraille de troncs nus qui s’affinaient à partir de deux mètres de hauteur et qui développaient leurs branches et feuilles penchées vers l’extérieur de ce monde intouché, presque menaçantes tant elles étaient concaves et voûtées.
Nous entendions le chant d’oiseaux invisibles à nos yeux, et j’avais l’impression que j’allais pénétrer dans un autre monde, presque un autre univers. Je tournais les yeux vers mes compagnons de voyage -ainsi que vers notre bouche trou de voyage- et notais que Cameron répertoriait mentalement les espèces des plantes qu’il voyait d’ici. Jusque là, rien d’original dans la flore. Il était impressionnant de voir le grand blond retrouver son sérieux en quelques secondes lorsqu’il était sujet de biologie environnementale. Ellie demeurait immobile, un sourire ravi accroché à son visage, ses jolies dents blanches faites et refaites mainte fois luisant au soleil du matin.
Les feuilles des arbres brillaient du reflet doré de l’astre solaire encore orangé, et les gouttes de rosée pendant sur les toiles d’araignées scintillaient comme une multitude de petites boules à facettes naturelles. J’attrapais mon appareil et prenais quelques clichés en mode macro lorsque je vis du coin de l’œil l’un de mes camarades esquisser un geste qui fit bondir les deux autres de côté. Je me retournais.
-Putain mais t’es un grand malade toi! Gueulait Cameron, les yeux exorbités, ayant préalablement mis quelques mètres d’écart entre lui et Luz.
Luz qui venait de dégainer une machette immense à la lame légèrement émoussée et au manche de bois poli par les années.
Le gentil, timide et travailleur Luz avec une machette de cinquante centimètres dans la main gauche.
Je venais d’avoir l’explication du pourquoi il écrivait comme un pied, et pourquoi on ne pouvait pas lui piquer ses feuillets pour copier. Saloperie de gaucher.
Le mexicain nous fixait, surpris de nous avoir fait peur, ses grands yeux innocents légèrement écarquillés, et je pouvais voir que même sans ses lunettes, ils étaient d’un brun foncé tout à fait banal. En même temps un mexicain aux yeux bleus ça n’aurait pas fait très crédible…
-Vous comptiez rester hors de la forêt? Ou vous glisser entre les branches et à travers les buissons?!
Il y eut un silence. J’avais penché la tête de côté, observant sans réellement écouter ce jeune homme de vingt cinq balais, en chemise boutonnée jusqu’aux poignets et au cou, rentrée dans son pantalon, un sac à dos imposant sur le dos et des photographies aériennes dans la main droite tandis que dans l’autre siégeait… Une putain de machette.
-Non sans dèc‘, vous pensez vraiment qu’on va pouvoir se déplacer dans une forêt vierge sans rien dans les mains?
Cameron tournait vers moi un regard interloqué, et je m’empressais de répondre:
-Parce que tu penses qu’on t’a emmené avec nous pour faire quoi à part te prendre les toiles d’araignées à notre place et ouvrir le chemin?!
Je vis son visage se décomposer légèrement. Oh bien entendu, il était au courant qu’aucun de nous ne l’appréciait, que nous lui avions payé le voyage pour des raisons pratiques, parce que nous avions besoin de lui… Mais de toute évidence l’entendre répété ainsi était douloureux.
Pauvre pauvre sans amis…
-Parce qu’en plus d’être un rebut de la société, une sangsue collée aux basques de l’état qui te paie des études pour que tu ailles au final enrichir le pays voisin t’es un grand naïf?
Je le vis baisser les yeux et j’eus un léger, très léger remords de m’en prendre à lui ainsi. Mais c’était tellement facile de lancer des trucs auxquels on ne croit pas le moins du monde et qui font souffrir affreusement à chaque fois…
-Bon… on y va? Lança Ellie tout en retirant sa chemise pour ne garder qu’un débardeur blanc aux fines bretelles qui glissaient de ses épaules bronzées, attirant par la même trois regards dont deux au moins tout à fait envieux.
Ce n’était pas nouveau que Cam’ et moi soyons comme deux chiens devant un os dès qu’elle montrait le moindre carré de peau. Mais je ne voyais pas Luz faire de même, et ça m’étonnait assez pour que je ne réponde pas…
Le latino s’approcha des arbres et après une seconde de silence et de réflexion pendant laquelle il parut prier, il éleva sa machette et fit une percée dans la muraille des arbres, pour ensuite s’enfoncer dans l’obscurité et la fraîcheur de la forêt.
OOoOoOo
Voilà deux heures que nous marchions. J’étais en tête de file, comme convenu, je tenais la machette que mon père m’a laissé avant de crever, et je tranchais les branches, buissons, troncs fins et lianes millénaires avec. Comme convenu.
Comme convenu c’était moi qui me prenait les toiles d’araignées. Et pas des petites, s’il vous plait! Avec tout le peuple encore dedans, des moustiques séchés gros comme une phalange, emmêlés dans les fils et l’araignée de mauvais poil grosse comme le poing pile entre les deux yeux.
Putain ils se sont marrés la bande de bourges derrière. Tous trois à se foutre de ma gueule parce que JE me prenais les racines aussi épaisses que des troncs, pour leur ouvrir le chemin tandis qu’eux étudiaient la merveilleuse faune locale.
Qu’ils aillent se faire foutre ces connards. J’aurais jamais du accepter de venir pour les beaux yeux de Connor. Ses beaux yeux bleus sans cesse posés sur les jambes d’Ellie, -qu’elle n’a même pas longues d’ailleurs!- ou sur ses fesses, ou ses seins, ou son sourire, ou… Connard.
-Eh la tête d’ampoule, t’avances?!
-Eh connard, tu permets que je prenne mon échantillon ou tu veux passer devant peut-être?
Connor-Connard. Ça va super bien ensemble. Espèce d’empaffé richissime, même pas canon, simplement foutrement bandant, charmant, mystérieux et dégageant une aura dans laquelle on veut se jeter à tout heure du jour et ce, malgré ce qu’il peut dire comme saloperie sur nous.
De toute manière je sais que les pires choses qu’il me sort sont fausses.
Mais rien que l’idée que certains puissent les penser, qu’elles soient en quelques sortes des pseudo croyances populaires du même genre que « un noir ça pue plus qu’un blanc quand ça sue. », « un noir c’est pas fait pour nager, z’ont un trop gros cul ça fait de la prise sur l’eau, c’est pour ça qu’ils sont jamais nageurs professionnels. Par contre ils sautent haut, tu parles après avoir passé deux mille ans à se balancer d’arbres en arbres…. » et toute la panoplie du genre me bousille de l’intérieur.
Bon, coup de bol, étant mexicain j’avais juste droit aux quelques vannes sur le fait que je suis censé voler, être immigré, avoir une trentaine de frères et sœurs qui traînent à moitié à poil dans les rues, une mère catin, dealer de la poudre, et avoir un flingue à l’arrière de mon pantalon.
Je refermais le sachet et continuais d’avancer, levant parfois les yeux pour apercevoir un rayon de soleil pénétrer l’épaisse voûte des arbres. Nous entre-aperçûmes plusieurs fois de petits singes qu’aucun de nous ne put nommer la race, on était biologistes, pas zoologistes, et le fait d’ignorer jusqu’à leur nom permettait de s’imaginer côtoyer des espèces inconnues jusqu’alors.
Parfois je me retournais pour le plaisir de voir Connor derrière son appareil.
Lorsqu’il regardait le monde à travers son objectif, il émanait de lui une sensualité sans failles, et je ne pouvais détacher mon regard de ses larges épaules finement musclées, de ses bras bronzés et de ses doigts arachnéens qui malgré leur force tenaient cet appareil avec une douceur que l’on ne lui voyait jamais.
Moi je gardais ma chemise, qui commençait à se déchirer au fur et à mesure de l’avancée, mais je préférais que ce soit un vêtement plutôt que ma peau qui soit abîmé. De toute façon, la forêt devait s’éclaircir d’ici quelques kilomètres.
-Hé le nain -putain t’accumules- lève ta machette plus haut, y en a qui dépassent le mètre soixante!
Allez vous faire foutre. Je vous déteste je vous hais.
Et je fais un mètre soixante neuf. D’abord… Même si je déteste cette position.
Je soupirais tout à mes pensées que je savais totalement immatures, et prenais une grande inspiration de cet air délicatement… vicié.
Mince oui, ça sentait l’air vicié, le vieil air qui est resté là depuis cinquante longues années sans qu’aucun être vivant ne l’ai inspiré, qui s’est entremêlé avec les effluves de la terre, des gouttes de pluie sur l’humus et chargé de la chaleur et de l’exotisme de l’épiderme des animaux du coin…
C’était juste… Inégalable.
-Ah ça pue, j’en ai marre!
Je me retournais pour jeter un regard mauvais à Ellie. Moi j’aimais cette odeur.
Et je détestais cette fille. Parce qu’en plus d’être jolie et riche, elle est aussi intelligente et ouverte d’esprit… Enfin vaguement quoi. Mais bref, je ne peux même pas la traiter de conne sans avoir l’air d’un con moi-même. Et lui dire qu’elle est superficielle serait signer mon arrêt de mort, d’autant plus que les deux autres crétins ne comprendraient pas de quoi je parle puisqu’ils le sont tout autant qu’elle…
…Sauf que sur Connor ça passe nettement mieux.
Un sourire niais parvint à mes lèvres et je ne vis pas la forêt s’éclaircir, encore moins les racines s’entrecroiser pile sous mes pieds…
Et je tombais en avant, n’ayant rien pour me rattraper, chutant sur mes genoux, jetant mes mains en avant pour ne pas finir totalement étalé par terre, je me retrouvais à quatre pattes, la machette ayant sauté de mes doigts pour atterrir plus loin.
-Ben alors le pauvre, t’as trouvé une racine intéressante? Me lança Ellie m’enjambant littéralement, et j’imaginais très bien les regards fiévreux des deux abrutis derrière elle qui devaient mater ses formes bien comme il faut, ignorant la loque étalée au sol…
-Allez lève toi, tu sers à rien comme tapis de sol, t’es aussi poilu qu’une gonzesse qui sort de chez l‘esthéticienne… Fit Cameron en passant à côté de moi, et je serrais les dents, me redressant lentement, ressentant le moindre détail des échardes et du gravier qui avait pénétré dans la pulpe de mes doigts.
Mais alors que je m’appuyais sur un genou pour me relever totalement, une main glissa dans mes cheveux et me flatta le crâne comme l’on flatte un chien.
-C’est bien Luz. T’as trouvé ta place.
La tape sur mon crâne résonna un instant, annihilant tous mes autres sens, et je ne me sentais pas me relever. Mes muscles se délièrent sans mon accord et une fraction de seconde après ses mots, j’étais debout, juste derrière lui alors qu’il reprenait sa marche le nez en l‘air.
Je sentis plus que je ne vis mes doigts se refermer sur son bras et le plaquer sans ménagement contre un arbre. Dans mon esprit, ma rage se nourrissait de l’écorce qui se plantait probablement dans son dos, et qui créait cette expression douloureuse sur son visage, déformant ses traits. Mon bras droit était bandé comme un arc, mon poing était serré à m’en faire craquer les phalanges alors que les doigts de mon autre main s’enfonçaient dans son épaule et autour de sa clavicule. J’allais enfin lui mettre mon poing dans la figure.
Depuis trois ans j’en avais envie… Entre deux crises d’amoureux transis, si, je vous jure, j’avais envie de le frapper.
Mais ses yeux s’entrouvrirent entre deux mèches de cheveux chocolat, et je vis ses pupilles s’agrandir au fur et à mesure qu’il se rendait compte de ce qui allait lui arriver. La surprise de voir le gentil Luz s’énerver pour… Si peu. Un « si peu » ajouté à trois ans de torture morale et d’amour à sens unique.
Je ne pouvais pas cogner ce gars. Je l’aimais.
Et ses yeux bleus… La vie devait être si facile avec la thune et le physique. Personne ne peut nous en vouloir plus de quelques secondes. Et il en jouait, je le sentais. Et j’étais faible.
-Putain! Je crachais à ses pieds, le relâchais en le poussant un peu plus contre le tronc et fit demi tour pour rejoindre les autres, replaçant correctement mon sac sur mon dos.
Lorsque j’atteins Cameron et Ellie, les deux bourgeois me fixèrent étrangement, comme si j’avais quelque chose sur la figure. Ah, oui bien sur… J’avais encore les traits tirés par la colère, ça devait leur changer…
Je passais devant Cam’ et lui foutais les captures d’écran sous le nez en pointant deux points sur les captures.
-On est là, on veut aller là. Démerde toi.
Je jetais mon sac au sol et en sortais une gourde que je portais à mes lèvres.
-Hé mais tu te prends pour q…
-Laisse Cameron, c’est toi qui va mener, Luz a besoin d’une pause, fit Connor en sortant du fourré ou je l’avais malmené.
Je tournais les yeux vers lui, toujours en buvant, et j’observais qu’il n’avais pas un instant l’air d’avoir été bousculé, sa démarche était toujours chaloupée, langoureuse sans le vouloir, ses longues jambes se croisaient toujours aussi bien, et il magnifiait le paysage de façon impressionnante.
Si j’avais pu… Osé… Bref, si j’avais pu, je l’aurais photographié, lui, ses longues jambes, ses chaussures de marche, ses yeux et ce sourire narquois tellement irresisss….
Je crachais un peu d’eau par terre.
Terminé. C’était terminé. Ça devait l’être et ça le serait.
Je lui tournais le dos et ouvrais un bouton de ma chemise pour avoir un peu plus d’air.
-Et pourquoi tu veux aller là? C’est quoi cette tache d’abord?
-De l’eau. Ça l’air d’être un point d’eau, donc on va y aller.
-Heu m…
-T’as pris combien de litres avec toi Cameron? Coupais-je agacé.
-Trois ou quatre je sais plus, et arrête de me couper, tu vas t’en manger une.
-Ouai bah avec trois litres tu vas tenir deux jours, et encore, sans te laver. Donc on va en direction de ce lac, de ce bassin ou je ne sais absolument pas quoi, avec un peu de chance on trouvera un ruisseau avant et on pourra changer de direction ensuite. Comme ça quand le pilote passera le quatrième jours pour nous balancer les vivres, il nous repérera vite vu que je lui ai montré la position du lac en partant.

OOoOoOo
C’était la fin de la première journée. Pas si mal passée. Un peu lourde par moments lorsque Luz avait piqué sa crise, mais sinon rien de bien méchant.
Ah si.
J’avais mal aux pieds. En même temps, marcher depuis l’aurore jusqu’au crépuscule, en ayant fait une minable pause de deux heures à midi… C’était pas étonnant.
Ce qui était étrange en revanche, c’est le fait de s’être accoutumé si vite à cette forêt.
Elle était aussi impressionnante qu’effrayante, pullulait d’insectes énormes, d’animaux sauvages à peine étonnés par notre présence, et surtout…
…On avait l’impression d’être dans une église.
Je ne m’en étais rendu compte que vers quatre heures de l’après midi, mais en fait, le groupe chuchotait la plupart du temps. Nous étions tout simplement en admiration devant tout ce que nous voyions.
C’était peut-être la voûte des arbres, qui était si haute qu’elle rappelait le plafond d’une maison de Dieu et les nœuds des troncs les clefs de voûtes, peut être aussi parce que le seul bruit que nous entendions hormis celui de nos pas était le chant des oiseaux exotiques, un chant si fin, parfois alarmé, parfois confiant, une merveille à l’oreille et à la vue lorsque nous les apercevions, leurs plumes colorées, leurs huppes altières et leur regard souverain juste avant qu’ils ne s’envolent et transpercent le ciel de verdure… Ou bien encore étaient-ce les rayons du soleil filtrés à travers les branches, qui plongeaient un à un et mettaient en valeur telle ou telle plante, si bien quelle semblait simplement divine et que nous nous précipitions pour l’étudier…
Mais outre cette impression, nous nous étions très rapidement faits à l’idée d’être dans une forêt dans laquelle personne ne pourrait jamais venir nous chercher s’il nous arrivait quelque chose. C’était excitant. Et effrayant. Mais ça ça allait avec l’endroit.
Avec ces lianes rongées de galeries d’insectes, couvertes par une sorte de lierre régional, lui-même enrobé dans une épaisse couche de toiles scintillantes.
Les gens croient toujours que les forêts sont comme celles d’Indiana jones, propres, impeccables, presque avec des petites fontaines et des pots de géraniums à droite à gauche. Mais non, pas du tout. Une véritable forêt, celle qui n’a jamais été entretenue n’est qu’un amas de troncs morts, d’herbes hautes, de plantes sauvages et de mousses poussant partout ou elles le peuvent. Et c’est ça la magie du vivant.
-Hé Connor t’arrêtes de rêver et tu nous aides à monter la tente? Enfin si c’est pas trop te demander hein, me nargua Ellie, clope au bec, ses cheveux voletant autour d'elle depuis qu'elle avait ôté son élastique.
Au temps pour les divagations d’un jeune fou…
Je rejoignais la jolie blonde à qui je fis un sourire charmeur et qui me tendit un arceau à monter.
-Tiens beau brun.
-Merci ma belle.
Une exclamation étouffée et un éclat de rire me fit tourner la tête vers Cam’ et Luz, occupés à planter des piquets avec une grosse pierre.
Enfin, anciennement occupés à ça, présentement l’un mort de rire, et l’autre pestant avec un doigt en bouche, Luz, vous l’aurez deviné.
-Putain mais faut vraiment être particulièrement CONS pour oublier un marteau en allant randonner!
-Râle pas trop, tu vas dormir dehors, enfin, ça devrait te rappeler tes jeunes années, ricana Ellie en glissant un arceau dans le tissu synthétique de la tente.
Le latino lui lança un regard blasé:
-Sans façons, merci. Vu comme ça grouille de petites bêtes, je me transformerai en grosse chrysalide en moins de deux heures…
Nous grimaçâmes tous en cœur, il était vrai que les bestioles pullulaient, et semblaient sacrément hargneuses. Je m’étais fait piquer deux fois et m’étais servi du tire venin le plus rapidement possible après, on sait jamais…
-Mais au fait, on fait comment pour dormir? Reprit-il en s’agenouillant à nouveau près de Cameron et reprenant sa tâche de tenir le piquet pendant que l’autre niais tapait dessus avec sa pierre.
J’avais remarqué qu’il ne m’avait plus regardé une seule fois depuis notre engueulade du matin, étrangement ça m’agaçait plus qu’autre chose. J’avais l’impression d’avoir un môme près de moi. …A bouder là…
-Ben y a deux chambres, donc deux par chambre, et je dors avec Ellie.
Cam et lui s’immobilisèrent et Luz me fixa soudainement.
-Ha ouai, ça restreint légèrement le choix là.
-Bah c’est comme ça, t’as qu’à t’y faire!
-Et pourquoi c’est…
Il s’interrompit et baissa les yeux en soupirant et secouant la tête.
-Laisse tomber, finit-il par lâcher, avant que le blond à côté de lui ne reprenne:
-Ouai non non, il a raison le Pauvre. Pourquoi c’est toi qui dors avec Ellie?!
-Faites gaffe les mecs, sinon je dors seule et vous vous démerderez à trois dans votre chambre.
Tout le monde sourit -sauf Luz- et se remit à sa tâche, laissant tomber pour ce soir. J’avais aucune envie de me retrouver dans le même espace clos, même fait de toile, que Luz pour l’instant.
Le simple fait qu’il m’ignore me perturbait déjà assez, et je n’avais aucune envie de devoir me battre avec lui, même si j’aurais gagné hein. Je fais quand même une tête de plus que lui. Merde!
L’absence de ses regards sur moi se faisait ressentir. J’y étais habitué. Pas seulement aux siens, à ceux de toute une population de mecs qui espèrent me ressembler, et qui imitent mon style de façon grotesque. Même si Luz lui, avait Son style qui craignait, du genre entre le super sage comme le prouvaient ses chemises super cintrées, fermées de haut en bas et impeccablement rentrées dans son jean ou son pantalon de toile, et le pseudo cool, du style gros gilet de skaeteur par-dessus tout ça.
Enfin en gros ça faisait trois ans qu’il me matait sans cesse, et il n’y avait pas eu le moindre changement dans son apparence. Ni ses cheveux noirs trop longs, ni ses fringues, ni ses manières de rat de biblio, toujours le nez dans un bouquin avec ses lunettes d‘intello qu‘il sortait pour lire. Alors bien que je ne comprenais plus le but de ses regards, je laissais couler. J’aime bien l’emmerder, mais je cherche pas à mettre quelqu’un dans l’embarras tout le temps non plus…

Au matin je me réveillais, Ellie collée contre moi, et je souriais d’un air victorieux en resserrant ma prise autour d’elle.
J’entendais la forêt s’éveiller autour de nous et nos voisins de chambrée par la même occasion.
Ce fut Luz qui sembla s’éveiller en premier car il grogna d’une voix lasse et endormie:
-Cam… Y a ta lampe de poche qui me rentre dans le dos…
J’entendais la respiration du blond se couper, un silence entendu s’installer et le latino reprendre d’une voix légèrement plus tendue.
-Cam?! Vire « ça » de mon dos. Tout de suite!
Une multitude de froissements de tissus synthétiques se fit entendre, et au jeu d’ombre qui se projetait sur la toile je devinais qu’ils étaient à présents assis face à face, la moitié de leur corps encore dans leur sac de couchage.
-Hn, ouai, c’était ma lampe, elle est… Heu… Attends je l’ai vue y a deux secondes…
-C’est ça oui Cameron, répondit la voix moqueuse de Luz.
-Ah ta gueule hein!
-Tu as fait de jolis rêves mon canard? Ricana le mexicain d’un ton rauque.
-Va te faire foutre!
-Râle pas, au moins t’es bien monté…
-Mais ta gueule-heu!
Le bruit de la fermeture éclair de leur chambre résonna et quelques minutes après nous étions tous dehors à profiter des rayons du soleil qui transperçaient le couvert des arbres en prenant notre petit déjeuner.
-Ben mes cochons, on a dormi longtemps, il est déjà dix heures! S’exclama la blonde avant de chambrer Cameron sur ses exploits nocturnes.
-Hey Cam, il parait que tu as peloté Luz toute la nuit?
-Ouai bien sur, je rêvais de toi et j’avais rien d’autre sous la main. Mais tu sais bien que t’es la seule l’unique à mes yeux ma belle. Rit le jeune homme en lui faisant un clin d’œil enjôleur.
Je levais les yeux au ciel et restais figé quelques secondes sur les oiseaux qui paraient les arbres comme autant de fruits dans un verger, et qui nous fixaient, l’air curieux du haut de leurs branches. C’était superbe.
Des pas à mes côtés me firent revenir parmi les hommes. C’était Luz qui venait de s’être changé, qui s’immobilisa près de nous, mangeant une barre de céréales avec un air encore endormi et pas rasé, et je réprimais un sifflement de surprise lorsque mes yeux se posèrent sur un treillis kaki, un marcel blanc et une chemise d’un noir légèrement passé ouverte sur son torse mais pas à ses poignets.
Ça changeait.
Nous l’avions tous remarqué, mais il semblait tellement peu concerné, que nous n’allions pas lui montrer que l’on l’avait capté. Ça va ouai? On est pas potes non plus…
En quelques minutes nous nous remettions en marche, la chaleur se faisait peu à peu pénible, et nous regrettions presque la froide humidité des premiers kilomètres dans la forêt. Mais nous avions du soleil par intermittence à présent, et ça ne pouvait être que bénéfique.
Plusieurs fois nous nous immobilisâmes devant une plante ou une fleur particulière, et Cam et Luz se lançaient dans un duel enflammé sur la possibilité que ce soit une race inconnue, mais presque à chaque fois le mexicain nous donnait son nom scientifique et nous expliquait qu’elle était certes rare, mais pas nouvelle.
Ce fut aux alentours de trois heures que nous tombâmes sur une véritable découverte.
Une petite clairière, d’une dizaine de mètres carrés s’étendait devant nous, et partout en son centre s’élevaient de timides orchidées aux couleurs chatoyantes qui nous firent briller les yeux de surprise et de bonheur. Je pris rapidement quelques clichés, des fleurs, de la clairière, des mines qu’affichaient mes compagnons de voyage à la vue de ce spectacle et mes trois camarades firent quelques pas dans la clairière. La terre était humide, et chaque pied posé au sol s’enfonçait dans un bruit mouillé sous le tapis de mousse et d’herbe.
Le visage de Luz s’était littéralement illuminé, et il avait tourné les yeux vers mon meilleur ami avec un air ravi:
-Tu as fait un exposé sur les orchidées Cam non? Tu trouves pas que les gynostèmes sont originaux?
Et le blond de répondre avec un sourire un peu gêné:
-…Je l’ai pas franchement fait seul, mais je l’ai lu une fois qu’il a été terminé, et effectivement, ils sont intéressants, et je n’avais jamais vu ce genre de coloris…
-Sans déconner, qui est assez con pour faire ton boulot à ta place?! S’exclama le latino en sortant une mini pelle dépliable et en déterrant un plant pour observer les racines avec un bourgeois blond le nez entre ses mains pour bien observer la merveille…
D’ici cinq minutes j’allais les retrouver le cul dans la boue avec un air extasié sur la tronche…
Je détestais me faire zapper…
-Bah des boursiers comme toi, mais bon, on sait très bien que le grand Luz est incorruptible…
Et là j’étais oublié bien comme il faut, remisé au grade de potiche inutile.
Putain j’y peux rien si les fleurs me barbent hein.
Alors pour compenser je prenais mon appareil et l’approchait du sol pour faire une photo d’eux en contre plongée.
Après deux clichés je râlais faussement:
-Luz tu peux t’écarter? Ta gueule de miséreux gâche la photo…
Et j’obtenais un sourire radieux du blond aux yeux noisette et un regard de tueur du boursier, fusillant un point extérieur au plan de l‘appareil -moi-, tous deux avec un début de barbe, les cheveux en pagaille et le teint légèrement brillant, accroupis devant une plante allongée religieusement sur leurs genoux.
Je venais de réaliser une magnifique photo, une des meilleures, et je me figeais les yeux sur l’écran, avec l’idée saugrenue que le sudiste était extrêmement photogénique.
Je restais plongé dans mes manipulations d‘appareil, et m’écartais d’eux l’air pensif.
Lorsqu’Ellie m’interrogea, je ne sus absolument pas me souvenir de ce qu‘elle venait de me demander à l‘instant, et je marmonnais quelque chose de neutre avant de m’écarter du groupe pour aller … Faire « pipi ».
-Mais Connor!
-Quoi?! Tu veux me la tenir aussi?!
Je balançais mon sac par terre et m’enfonçais quelques mètres dans la forêt, après quoi, ayant trouvé une vue plus ou moins distrayante -des arbres, des feuilles, des insectes-, j’ouvrais ma braguette…
Quand on dit que les femmes sont incapables d’aller pisser toutes seules et c’est pas faux. Pipi à deux c’est vraisemblablement mieux. Mais il faudrait cesser de ne décerner le prix du « pissou » en groupe qu’aux nanas.
Non parce que depuis que je connais Cameron, je n’arrive plus à me vider la vessie seul. Enfin moi j’y arriverai très bien… Surtout s’il ne rappliquait pas chaque fois que j’ouvre la tirette de mon jean comme si les fermetures éclair émettaient des ultras sons qu’il était le seul à entendre et ce, quelle que soit la distance.
-Hey Connor! Je te jure, ces plants sont magnifiques! Et il y a au moins cinq mutations ou évolutions des…
Et vas-y que ça descende son calbar tout en causant de détails d’une putain de tige, et l’autre immigré qui débarque et qui lui répond en l’imitant… Nous voilà au milieu d’une forêt vierge, trois cons la queue à l’air, pour un peu ça ressemblerait à Tonnerre sous les Tropiques… Sauf que moi quand y a du monde excité autour de moi ben ça me…
-Bah alors Conny, t’as du mal?
Et le blondinet de se retourner vers Luz un peu plus loin en chuchotant plus fort qu’il ne parlait précédemment:
-Monsieur peut pas se concentrer quand il y a trop d’animation, tu te rends compte? Il arrive pas à…
-Va crever Cam! Je coupais, fâché avant d’inspirer profondément en le voyant s’en aller faussement vexé en écartant les branches qui se dressaient sur son chemin.
Génial. Je restais seul avec l’intello qui se métamorphose en brute épaisse quand je…
…Quand je dépasse les bornes…
Je me mordais la lèvre. C’est vrai que j’avais exagéré. Et depuis, il ne me regardait plus, ne m’approchait plus, ne me parlait plus.
Bon c’est pas comme si nous avions jamais été proches, encore moins que nous ayons un jour beaucoup parlé, mais au moins avant j’avais ses regards sur moi. Ils étaient -maintenant que j’y réfléchissais plus d’une fois par heure- comme une sorte de couverture d’aise et de calme… Comment dire?
Je me sentais… Entouré… Comme dans un cocon…
Ridicule.
Je soufflais bruyamment, les sourcils froncés.
-T’inquiète, je me barre dans deux secondes, fit une voix dans mon dos.
Je tournais la tête pour voir Luz dos à moi. Au moins lui a le sens des convenances.
-Nan attends…
J’entendais sa braguette se refermer et ses pieds fouler le tapis de feuilles exotiques derrière moi.
Il souffla de façon blasée:
-Quoi?
-Je suis désolé. Je marmonnais.
-Hein?
-Excuse moi pour hier.
Je laissais tomber la tentative de pisser et me retournais vers lui après m’être r’habillé.
Je n’osais pas le regarder, du coup je fixais le sol à ses pieds. Son silence me mettait mal à l’aise et je n’entendais que ma respiration, le chant des oiseaux, le craquement de branches au loin ainsi qu’Ellie et Cameron qui paraissaient se prendre la tête à cinquante mètres de nous.
-Je suis désolé de d’avoir un peu exagéré. Et je comprends ta réaction…
Le silence se prolongeait. Encore… Je me demandais même s’il ne s’était pas barré avant que je termine ma phrase, et si ses chaussures n’avaient pas été dans mon champ de vision j’aurais réellement douté.
Je levais les yeux et tombais sur le plus magnifique sourire qu’il m’eut été donné de voir.
Pas que ses dents aient été blanches et parfaitement alignées hein, il avait un sourire de fumeur, mais un délicieux fumeur. Qui en plus n’avait pas allumé la moindre cigarette devant moi depuis que je l’avais rencontré.
Nous demeurâmes figés un instant avant qu’il ne se reprenne et tente de resserrer à plusieurs reprises ses lèvres, si bien que je me mettais à sourire aussi bêtement que lui avant d’éclater de rire.
-Sans déconner Connor, tu t’excuses? Toi?!
Je levais les yeux au ciel.
-Ouai, ça m’arrive, mais ne t’y habitues pas.
-Attends ferme la.
-Hein?
-Ta gueule.
Je le fixais, les yeux fermés, un sourire béat aux lèvres, la tête légèrement penchée en arrière, les pans de sa chemise tâchés de boue et de sève, ses poignets étroitement enserrés dans les manchettes noires.
-Tu fous quoi?!
-Je savoure.
Je pouffais de rire et me retournais pour faire quelques pas et reprendre ma petite affaire. De toute évidence son rire m’avait détendu…
-Dis donc, je suis flatté là.
-Qu’est-ce que tu racontes encore comme merde Luz?
J’essayais d’avoir un ton sec et sévère, mais j’étais trop content d’avoir son regard sur ma nuque…
-T’arrives à te… Détendre… Devant moi. C’est flatteur, c’est tout.
Je refermais mon pantalon et me retournais pour lui faire de gros yeux.
-T’es grave comme mec l’immigré.
Nous retournâmes vers les autres, marchant l’un à côté de l’autre, juste « heureux »; disons plutôt « satisfaits ». Il avait l’assurance que je ne le laisserai pas sur place une fois que l’hélico viendrait nous chercher, et j’avais ses regards dont je ne comprenais toujours pas la signification sur moi.
Youpi.

-Putain mais t’es vraiment trop con Cameron! Tu laisses une putain de tantouze pisser à côté de ton meilleur pote comme ça?
-Qu’est-ce que t’en sais?! Et qu’est-ce que ça peut te foutre, c’est pas comme si Connor allait se le faire! Merde à la fin!
De toute évidence ils s’engueulaient depuis le retour de Cam’, soit plusieurs minutes, et tous deux avaient eu le temps de faire monter leurs voix d’un bon paquet de décibels. Si bien que Luz et moi nous étions figés à plusieurs mètres d’eux.
-Mais il est canon c’est OBLIGE que ce pédé essaie de le peloter bordel!
-Attends mais tu crois que Connor sait pas se défendre? T’es bonne mais vraiment trop conne ma parole! Et je pensais pas qu'une fille comme toi puisse avoir un problème avec les gays!
La blonde explosa d’un rire hystérique:
-C’est le petit raciste de base qui me sort ça? Mais je rêve! Et sache, que j’en ai rien à foutre des pédés, TANT QU’ILS MARCHENT PAS SUR MES PLATES BANDES!
Mon regard dévia vers le latino à mes côtés, qui avait l’air tout bonnement ébahi, choqué, statufié. Je posais ma main sur son bras pour le ramener à la réalité, et il fit un bond de côté en me regardant de travers avant de s’avancer vers les deux autres qui se turent instantanément.
-Bien…
Il toussa un peu, cherchant ses mots.
-Maintenant que tu peux voir que le côté viril de ton mec est toujours présent Ellie, je pense que je peux me permettre de te rappeler que ma vie ne te regarde pas, et encore moins ma présumée orientation sexuelle. La prochaine fois que tu projettes de faire un foin, vérifie d’abord qu’il y ai raison de le faire. Sans quoi tu vas souvent passer pour une pouffe avec un état d’esprit tout bonnement merdique.
-Oh je t’en prie, tout ce que j’ai dit est justifié. Et tu le sais très bien. Je t’ai vu avec le mec du cours de géologie, le brun aux yeux bleus…
Elle fit mine de réfléchir:
-Ah tiens! C’est vrai, brun aux yeux bleus, un peu comme Connor!
-T’es vraiment complètement conne Ellie, s’exclama le latino dont le regard semblait foncer de seconde en seconde.
-Et toi?! Hurla-elle à moitié en se tournant vers moi qui sursautais lamentablement. Ça te fait rien qu’une tarlouze te mate depuis des plombes?!
J’eus l’impression que la vitre fumée qui me séparait de la scène irréelle en plein milieu d’une jungle magnifique explosa soudainement, et je repris conscience de tous les sons précédemment assourdis par mon… ébahissement. Les oiseaux s’étaient tus et envolés à cause des cris de la jeune héritière, une très légère brise agitait les feuilles des arbres, et trois regards étaient tournés vers moi. Moi qui devais avoir l’air d’un canard sur une autoroute…
-Heu… Je sais pas…
Oralement ça devait plus ressembler à un  « Ch’po… » .
-M’enfin t’en penses rien? S’excitait Ellie.
Non, j’en pensais rien. Ça m’emmerdait plus qu’autre chose, Luz avait l’air mal à l’aise, et moi j’avais aucune envie de faire des suppositions qui m’amèneraient un poing dans la gueule…
-Je… Heu…
Je fixais Luz, qui finit par tourner ses iris si sombres dans ma direction, l’air empli d’une immense colère qui ne demandait qu‘à exploser à tout instant.
-Ça me regarde pas. Et ça te regarde encore moins je crois…
-Ça te regarde pas?! Mais c’est toi qu’il veut enc…
-Ellie! Gueula Cameron, Ta gueule!
-Ça ME regarde putain! Reprit la blonde, c’est MOI que tu as touché toute la nuit, c’est sur moi que ta langue a…
Je cessais de la fixer comme elle s’interrompait pour regarder Luz se jeter à moitié sur le pauvre Cam:
-On est ou? Gronda-il en lorgnant la carte d’un œil mauvais.
L’autre répondit un « là » presque craintif en montrant un point du bout du doigt.
-Et la direction à partir d’ici c’est..?
-Heu… Par là…
Ni une ni deux, la carte changea de porteur, tout comme la machette, et en quelques secondes durant lesquelles nous restâmes immobiles, Luz s’enfonça dans la forêt à pas plus que vifs, enveloppé d’une aura de hargne assez impressionnante.
Je jetais un coup d’œil à Cameron et un doute me submergea. Le blond pouvait être très efficace en temps normal, mais aussi très évasif lorsqu’il se sentait menacé… Et j’avais un mauvais pressentiment quant à la route à suivre…
Mais lorsque mon ami me balança mon paquetage dans les bras, me coupant le souffle par la même occasion, je ne pus que le suivre à grandes enjambées, sans m’attarder plus longtemps sur Ellie.
Elle m’avait déçu.
Vraiment.
Oh bien entendu, je n’étais pas un grand défenseur du gay et de la tapette, mais elle m’avait mis en situation de faiblesse, et je la haïssais pour ça.
Les heures défilèrent à un train d’enfer, nous ne faisions aucune pause, étions tous en sueur, et Cam et moi attrapions des échantillons de plantes à la va-très-très-vite-si-tu-veux-pas-perdre-le-guide, tandis que Luz se faufilait entre les branches comme s’il avait fait ça toute sa vie.
Il y eut un instant ou nous vîmes une ombre entre les arbres, et je n’eus que le temps de mitrailler en rafales la forme presque invisible avant que celle-ci ne fuie au grand galop dans les fourrés.
Derrière moi Ellie peinait à nous suivre, mais je n’avais aucune envie de ralentir pour elle. Son coup d’éclat avait bousillé l’ambiance à peu près correcte que nous avions enfin instauré, et brisé la reprise des regards du latino sur moi. Et mon dieu ça me faisait chier.
Je crois que le pseudo coming out forcé en pleine jungle m’avait laissé indifférent. Il n’avait rien « avoué », et je ne voyais pas pourquoi il le ferait, il n’avait aucun compte à nous rendre c’était logique… S’il avait passé son temps à se frotter à moi, là, oui. Mais en dehors du fait qu’il ne s’intéresse absolument pas à Ellie et qu’il me fixe un peu trop, je ne voyais pas pourquoi on l’emmerderait pour savoir si c’était la queue ou le steak qui le tentait.
Et en plus, je n’appréciais pas du tout d’être la propriété de quelqu’un. Fut-ce la fille derrière laquelle je courais depuis des lustres.
Le terrain en pente douce m’épuisait. Nous devions être assez haut sur la côte de la montagne car la végétation changeait progressivement et les rochers se faisaient plus nombreux à escalader ou à contourner.
Aux alentours de dix huit heures je dépassais Cameron pour rejoindre Luz en tête de file et m’approchais de lui presque comme si j’avais tenté de calmer un animal sauvage.
Il dut s’en rendre compte car il tourna la tête vers moi et m’interrogea du regard, restant étrangement sur ses gardes, comme si j’allais l’assommer de questions du genre « Alors tu veux me sauter? ».
-J’ai presque plus d’eau, soufflais-je, tu sais si on atteindra la source ce soir?
Il s’approcha un peu de moi et je ne pus m’empêcher de faire un pas en arrière. Dans ses yeux passa un éclair de douleur et il ferma une seconde les paupières. Je me maudis et fit deux pas vers lui, posant ma main sur son poignet toujours couvert par sa chemise.
Il ouvrit les yeux et inspira doucement avant de chuchoter:
-On devrait y être depuis deux heures…
J’écarquillais les yeux et le suivais alors qu’il accélérait le pas.
-Tu nous as paumés Luz?!
Il claqua la langue. Agacé.
-Tu m’as embarqué avec vous parce que je suis le meilleur.
Ses yeux se figèrent dans les miens.
-Et je suis le meilleur. Seulement j’ai commis l’erreur de m’énerver avec toi et de refiler la carte à un mec qui -même s’il a voulu faire de son mieux- n’y connaît rien. Du coup je sais absolument pas de combien on a dévié, ni si ça a commencé tout à l’heure ou déjà hier.
-Merde! M’exclamais-je en sentant monter en moi un sentiment nouveau: La peur.
La source était le minimum que nous devions atteindre. C’était une sorte de borne de secours. Si on ne l’atteignait pas, c’était fini…
-Qu’est-ce qu’on fait?!
-Déjà tu vas commencer par te calmer Connor, on va pas crever parce qu’on ne trouve pas de flotte ce soir. On bâchera le sol avec les toiles de tente pour récupérer la rosée du matin. Ça sera déjà ça. Ensuite tu vois le rocher là haut?
J’acquiesçais.
-De là on devrait avoir une vue assez importante de la forêt. Et on devrait pouvoir trouver un point d’eau. On a des jumelles. On a tout ce qu’il faut ok?
Je sentais qu’il me disait ça pour m’empêcher de paniquer, et ça marchait nettement moins du coup…
Il accéléra ses foulées et je dus faire quelques pas de course dans l’herbe drue pour le rattraper:
-On en parle pas aux autres?!
-Tu veux franchement que l’hystérique se remette à crier?
D’un mouvement commun nous jetâmes un coup d’œil en arrière, suivant des yeux la blonde qui paraissait pester contre le monde entier puis sans un mot reprîmes notre route, plus vite, et plus nerveusement en direction du rocher.
Le soleil commençait à descendre en fonçant lentement vers le rouge et la température baissait à peine, les cimes des arbres s’étaient teintées d’une lueur orangée qui parfois atteignait les parties de notre peau révélées à sa chaleur par l’absence de tissu.
Je le sentais sur ma nuque, comme une caresse d’une amante affectueuse, puis sur mes épaules, comme si cette amante me retirait ma chemise et que cette dernière frôlait ma peau en glissant le long de mes bras, et je ne pouvais empêcher mes yeux de se plisser de contentement et d‘aise.
Nous arrivâmes au pied du rocher et Luz balança son sac au sol écrasant la race de fougères locales, avant de grimper comme la plus agile des… Heu… J’aurais dit chèvre vu comme elles escaladent tout et n’importe quoi, mais Luz n’avait strictement rien à voir avec une chèvre. Peut-être lorsque je l’ai rencontré, oui. Mais là, avec le dos de sa chemise trempée, les muscles de ses cuisses qui semblaient rouler sous la toile de son treillis, et son agilité déconcertante j’aurais plutôt dit un félin. Même si le cliché du félin est définitivement passé.
Bref, il grimpait comme un dieu, et je m’empressais de le suivre en ignorant les « vous foutez quoi? » des deux autres qui venaient de s’écrouler de fatigue, bien décidés à nous attendre en bas.
Mes doigts se refermèrent sur une prise de la face du rocher qui était à présent vertical, et je regrettais presque d’avoir voulu suivre l’autre présumée tarlouze. Tu parles, un gay qui grimpe mieux qu’un hétéro, c’est pas probable dans l’esprit de beaucoup. Et je dois dire que j’étais totalement neutre dans ce débat. J’abhorrais les espèce de folles qui causaient chiffons et mascara. Pour moi c’était une sorte de sous espèce ratée… Un truc ne ressemblant ni à un homme ni à une femme. Juste à un « Rien » bien distinct.
Après les gays virils, ils m’ignoraient et je les ignorais, dans le sens, tant qu’ils ne me draguent pas lourdement, on pourra causer des heures et pioncer dans le même lit sans souci.
Cameron était nettement plus ouvert que moi de ce côté… Définitivement hétéro, sans aucun doute, mais vu qu’il prenait tout à la rigolade, les quelques fois ou un mec lui avait roulé un patin il n’avait réagi qu’en éclatant de rire avec un « heeeeee dégueuuuuu » digne d’un ado. Pas farouche l’hétéro…
Je peinais à monter à présent. Il ne restait qu’un mètre et des cacahuètes avant une plateforme au sommet du rocher, mais les prises se faisaient rares et j’avais beau être plus grand que Luz je galérais humblement.
Au dessus de moi le latino disparaissait en bougeant quelques brins d’herbe qui avaient élu domicile tout en haut, et j’entendis sa voix porter jusqu’à mes oreilles alors qu’il se mettait à plat ventre pour me tendre la main.
-Tu sais, Ellie a beau être une conne finie…
Il remonta sa chemise le long de ses avants bras et je retins un sursaut qui m‘aurait fait dévaler la roche et la mousse. Une croix chrétienne avait été tatouée sur sa peau, un peu plus haut que la mi chemin entre son poignet et son coude, et elle ressortait comme si son épiderme avait été plus blanc que celui d’un cadavre.
Je glissais ma main dans la sienne, avec l’étrange envie de remonter plus haut encore et de parcourir de mes doigts cet étrange tatouage qui paraissait être une espèce de cicatrice…
Comment dire? Comme si l’on avait fait au couteau avant de verser l’encre dessus.
-…Elle a pas totalement tord.
Tous ses muscles se bandèrent alors qu’il me hissait vers le haut, me permettant de placer mes pieds sur une nouvelle encoche dans la roche et mon visage à hauteur du sien.
Sa main remonta jusqu’à mon coude et l’autre l’imita, alors qu’il tirait à nouveau, me faisant poser un genou sur le sommet du rocher.
-Je suis gay, lança-t-il d’un ton étrange alors qu’il me prenait par les hanches pour me relever entièrement.
-…Et je te veux Connor, murmura-il en me plaquant contre lui sans reculer, me laissant au bord du rocher, le vent tiède glissant tout autour de moi, jusque sous les pans de ma chemise ouverte, jusque sur le bas de mon dos, entre ses doigts qui s’étaient possessivement enfoncés dans ma peau.
J’étais plus grand que lui, j’avais baissé la tête sans y penser, et tout un côté de mon visage était pressé contre le sien, alors que son souffle atteignait ma clavicule par intermittence. Mes mains avaient rejoint ses épaules et les enserraient le plus fort possible.
Je n’avais plus aucune envie de bouger. Ce n’était pas tant ses mots qui m’avaient troublé. Bien que ce fut une déclaration quelque peu mal orchestrée. Franchement qui a l’idée de le faire alors qu’on se trouve en pleine -fin, certes- d’escalade?
Mais à cet instant je n’avais aucune envie qu’il me lâche. Et comme dit plus tôt, ce n’était pas sa déclaration qui me faisait cet effet, mais bien le fait que je n’avais que la pointe des pieds sur le sol, et que mes talons étaient encore dans le vide.
Il me laissait là, à moitié dans les airs, pile entre la vie et la mort, lui sur le chemin de la vie, et mon refus qui serait l’envoi vers la mort…
J’avais le sentiment de m’être bien fait baiser pour le coup…
Il reprit la parole, d’une voix teintée de regrets et de colère que je ne lui connaissais pas et qui sur le moment me semblait plus être celle d‘un psychopathe qu‘autre chose:
-Mais toi non… Toi tu ne veux pas de moi…
Je sentis ses doigts glisser le long de mon dos, prêts à se détacher de moi et je frémis de peur, me serrant plus contre lui et hoquetant:
-Ne me lâche pas Luz. Je t’en supplie.
Il allait pas me balancer du haut de ce caillou de dix mètres juste pour un râteau quand même?!
Ses mains se resserrèrent alors et sa voix se fit plus tendre:
-Alors embrasse moi…
Comme un pantin mes lèvres glissèrent sur la plus proche parcelle peau, son cou, puis glissèrent le long de sa mâchoire sans que je n’ose reculer plus de peur de tomber dans le vide, et remontèrent jusqu’à sa bouche que j’embrassais nerveusement alors qu’un grondement de contentement montait de sa gorge et qu’il m’attirait un peu plus contre lui. Je pus faire un pas en avant et mon pied droit était enfin sur la terre ferme.
J’approfondissais le baiser, glissant ma langue entre ses lèvres tandis qu’il les entre ouvrait pour moi, et me caressait de la plus tendre des façons.
Mais après quelques secondes il recula son visage et me fixa étrangement, je crus qu’il allait changer d’avis et me pousser en arrière mais il ne fit que m’entraîner d’un pas de plus vers lui et de murmurer:
-Tu trembles… Tu as froid?
Ça y était, je n’étais plus en danger, j’étais enfin sur ce putain de rocher, je m’écroulais à ses pieds et me recroquevillais sur moi-même en me retournant lentement sur le dos pour contempler le ciel, le souffle erratique, le cœur battant à tout rompre dans ma poitrine.
-Co… Connor?
Sa main s’avança vers moi et je fis un sursaut de côté, évitant son toucher avant de l‘entendre s‘exclamer d‘une voix incrédule:
-Putain!

OoOoO

-Putain!
Je m’écroulais au sol à mon tour. Derrière moi le mont Mabu continuait de monter, et devant moi s’étendaient des kilomètres de forêt si dense qu’on ne voyait pas une seconde le sol sinon au pied du rocher. Et encore, on n’apercevait ni Cameron ni l’autre garce.
Juste à côté de moi, Connor, les yeux brillants de larmes contenues, le genre de larmes d’homme, celles que l’on fait mine de ne pas voir mais qui font plus honte que des cris et une tempête de pleurs.
Je venais de comprendre. Les cinq dernières minutes, celles qui avaient paru être une fraction du paradis à mes yeux n’étaient qu’un lamentable quiproquo.
-Qu’est-ce que je viens de faire Connor?
Ses yeux si bleus se tournèrent vers moi, avec la compassion angoissée d’une victime qui regarde son futur bourreau complètement cinglé.
-Bon sang c’est pas une question rhétorique! Qu’est-ce que tu as CRU que je faisais?!
Il papillonna une seconde et inspira longuement:
-Tu… Tu m’as maintenu au dessus du vide, en me disant que tu… Que tu me v… Et après, comme je répondais pas, tu as voulu me laisser tomber et…
Ses deux mains s’étaient jointes et il tordait ses doigts sans aucune douceur, comme le font souvent les victimes de choc émotionnel.
-Connor…
-Et… Et j’avais les pieds dans le vide, et toi tu allais me lâcher si je ne t’embrassais pas et…
-Bordel!
Il sursauta et s’éloigna de moi presque en rampant. Je venais de crier de rage. C’était impossible… Putain…
-Connor je savais pas que tu étais encore à moitié dans le vide. Jamais je ne t’aurais fait ça… Je rêve! Putain je rêve! Mais tu me prends pour qui?!!
Nous restâmes silencieux pendant de longues secondes, perdus dans nos pensées, Connor se remettant de ses émotions et tentant de comprendre la vérité, ou ce que je tentais de toute évidence de lui faire gober.
-« Ne me lâche pas Luz. Je t’en supplie. », Bordel, j’y ai cru.
J’éclatais d’un rire nerveux.
-J’ai vraiment cru que tu voulais rester contre moi. Quel con!
Mon regard quitta le paysage merveilleux sous mes yeux pour se poser sur un autre spectacle qui aurait lui aussi pu être magnifique s’il n’y avait eu cette lueur de doute et d’angoisse dans les orbes bleues celui que j’ai failli tuer. Connor était à moitié allongé, son souffle se calmant peu à peu, de la sueur que je devinais froide coulant le long de ses tempes, et je m’interrogeais. Comment pouvait-il croire…
Bon sang j’étais pas censé deviner qu’il avait les pieds dans le vide, si?
Et pourtant, c’est vrai que jamais il ne serait resté près de moi autrement. La surprise et le contentement à son contact se sont tellement mêlés l’une à l’autre que je n’ai pas réfléchi…
Peut-être aussi que la peur froide d’être perdu m’est montée à la tête, annihilant le reste de mes sentiments… Je ne sais pas… J’étais tellement concentré à ressentir le plus de colère possible pour ne pas céder à la terreur de rester bloqués dans cette putain de forêt vierge que je ne me souviens plus de la totalité de mes sentiments. Comment dire?
Lorsqu’on est en ville, ou chez soi, dans un milieu connu. Il y a nos sentiments généraux, peine, bonheur, plus les sentiments plus brefs, agacement, félicité de petits actes du moment.
Alors qu’en territoire inconnu, le doute, l’appréhension, l’excitation, la joie de la découverte se mêlent les uns aux autres. S’ajoutent ensuite à eux les sentiments quant à la compagnie que nous avons, colère, envie, désir, amour, amitié, tendresse, lassitude, qui se succèdent les uns aux autres à une vitesse vertigineuse. En plus d’eux il y a également les émotions directes des évènements instantanés. Peur, colère, agacement. Et certains prennent le pas sur les autres.
Cette putain de forêt avait failli me faire tuer celui que j’aime, -bon que je veux baiser, ne tombons pas dans le mélodrame- et me faisait à présent passer pour un pédé psychopathe…
A en voir le regard bleu figé sur la croix sur mon avant bras, ça va sans dire qu’il me prend pour un pur malade.
Comme si je m’étais tailladé le bras tout seul avant d’y verser de l’encre… Franchement… Vous saviez qu’aucun humain ne peut se mordre jusqu’au sang? S’il y arrive il est mentalement dérangé et n’a pas la notion d’égoïsme.
Bon bien sur, pas l’égoïsme dans le sens « je ne prête pas mes affaires » mais plutôt dans le sens « je me protège et j‘ai un certain regard sur moi».
Mais si cet abruti peut croire que je me suis fait ça seul, il doit bien croire que je suis un taré qui veut son cul…
Bon sang mais quelle poisse!


La seconde partie arrive de suite.
Par Absynthe - Publié dans : Cock Tales Cocktails - Communauté : Lawful Drug
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