Rêves d'Absynthe

 Suite...

 

 

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Quelques jours avaient passé pendant lesquels David avait à nouveau voulu le prendre en photo dans les mêmes conditions que la première fois. Baptiste s'était plié à ses exigences avec cependant quelques réticences, souhaitant que le jour où il pourrait se raser et couper ses fichus cheveux viendrait vite. Il avait aussi hâte de porter les vêtements que le photographe lui avait achetés. Ils étaient ressortis la veille, pour choisir quelques habits plus chauds, dont des pulls en grosse laine, car l'hiver était encore là pour un moment et, selon ce que lui avait dit David, la majorité des clichés seraient pris en extérieur.

Ce jour-là, il s'était levé tôt. Il n'avait pas très bien dormi, contrairement aux nuits précédentes, David l'ayant réveillé aux alentours de dix heures tous les jours depuis qu'il l'hébergeait. Cette fois-ci, il avait ouvert les yeux à sept heures tapantes, et ne parvenant pas à retrouver le sommeil, il s'était levé sans un bruit, et à pas de velours, s'était rendu dans la cuisine, qu'il apprenait à connaître comme les jours passaient. Il avait cherché un moment avant de trouver de quoi se préparer un chocolat chaud.

Il dégustait maintenant sa boisson assis dans le canapé du salon, regardant au dehors les flocons de neige descendre lentement jusqu'au sol. La situation avait quelque chose de féérique pour lui qui, à peine une semaine plus tôt, grelottait du matin au soir en se serrant dans un bout de tissu rapiécé, auprès de sa chienne...

Enfin, celle de Nathalie. Quelle histoire sordide...

Leur rencontre avait été classique. Un bar. Une nuit passée ensemble. Et l'envie de continuer encore un peu. Finalement, leur couple était tout ce qu'il y avait de plus banal, mais ils étaient heureux. Elle était un peu nunuche, mais il l'aimait tout de même. Mannequin, elle gagnait pas mal sa vie. Lui n'ayant plus de parents avait trouvé là une personne pouvant l'aider. Elle l'avait hébergé, elle avait payé l'entrée à l'université qu'il avait choisie...

Jusqu'au jour où, brusquement, elle avait disparu. Du jour au lendemain, elle n'avait plus été là. Ses agents avaient eu beau lancer des forces de police à sa recherche... NeuNeu avait disparu. Elle n'était plus là, et lui se retrouvait tout seul.

Il n'avait plus payé le loyer, et avait été expulsé. Quant à son université... Un clochard ne peut pas se permettre d'étudier. Il n'avait plus les moyens, et l'huissier avait saisi tout ce qu'il possédait, même si l'appartement n'était pas à son nom.

Il s'était donc retrouvé à la rue avec Gaya pour seul compagnon. La chienne avait alors recueilli toute son affection, et il s'était attachée à elle comme si ç'avait été une humaine.

Il avait d'ailleurs eu du mal à passer la journée sans elle, lorsque David l'avait emmené en ville pour faire les premières photos. Le soir même, à peine étaient-ils rentrés, qu'il s'était précipité chez la concierge pour la voir.

À voix basse, pour que personne à part elle ne l'entendît, il s'était excusé, désolé de l'avoir laissée seule. La chienne ne semblait pas lui tenir rigueur, en démontraient ses jappements de joie incessants et sa queue qui battait l'air, envoyant par là même des poils voler vers la concierge qui prenait un air dégouté. Il en avait ri sous cape.

Finalement, il avait été obligé de laisser Gaya avec cette triste femme pour monter manger et dormir.

Totalement épuisé, il n'avait pas tardé à trouver le sommeil.

 

Le grand jour était enfin arrivé.

Il s'était réveillé tôt, impatient. David dormait encore alors qu'il était déjà lavé et habillé, attendant son hôte assis dans le salon, tordant ses mains de nervosité et de joie contenue. Lorsque le photographe l'avait rejoint d'un pas ensommeillé, les cheveux en bataille, il avait gentiment ri de le voir prêt si tôt.

Baptiste l'avait assuré qu'il ne voulait pas le presser, et qu'il pouvait prendre son temps, cependant il avait bien remarqué que son hôte s'était préparé plus vite que de coutume, lui qui, il avait pu le remarquer depuis une semaine qu'il vivait avec lui, aimait paresser avant que la journée ne doive vraiment commencer.

La veille de ce jour-là, David lui avait annoncé qu'il était parfaitement satisfait de la première série de clichés qu'il avait pu développer -mais qu'il refusait pourtant de lui montrer- et qu'ils pouvaient donc passer à la suite. Il lui avait donc accordé l'autorisation de se raser, et d'obtenir une coupe de cheveux convenable.

Ils se rendaient donc chez le coiffeur. Baptiste avait du mal à tenir en place, et sur le chemin tout enneigé, il serra ses mains dans ses poche pour cacher son excitation à l'homme qui venait enfin de le libérer.

Lorsqu'ils pénétrèrent dans le local embaumant le shampooing, il sentit les battements de son cœur s'accélérer. Il n'eut pas vraiment de conscience de s'avancer vers cette femme qui l'accueillait en souriant, ni de s'installer sur ce siège tandis que l'eau commençait à couler dans ses cheveux. Il ferma les yeux.

Il se laissa faire sous le regard amusé de David, qui n'avait de cesse de lui adresser des sourires moqueurs dès qu'il voyait à quel point il appréciait le traitement de la coiffeuse sur son cuir chevelu. Le photographe récoltait bien entendu à chaque fois des regards noirs mais en riait plus qu'autre chose. Baptiste avait finalement décidé de le laisser faire, trop perdu dans le bonheur d'avoir enfin les cheveux propres.

La femme le fit s'installer devant le grand miroir qui recouvrait tout le mur. Un peu anxieux, il lui signala qu'il voulait ses cheveux courts, sans autre fioriture, et plus un poil de barbe. Elle sourit puis commença le travail. David s'était rapproché de lui et lui sourit, sans moquerie cette fois, comme pour lui dire qu'il pensait comprendre ce qu'il ressentait. C'était bien évidemment impossible, mais l'intention était louable. Aussi Baptiste lui rendit-il son sourire. Il ferma ensuite les yeux, et mit son esprit au repos tandis qu'autour de lui tintaient des bruits de ciseaux et de peigne.

 

Plus tard, on lui annonça :

-C'est terminé.

Le cœur battant, il ouvrit alors les yeux et se figea, ne reconnaissant pas le jeune homme en face de lui. Ému, il sourit à son reflet. Si, finalement, c'était bien lui. Lui, plusieurs mois auparavant. Lui, Baptiste, vingt ans, l'étudiant, et pas Baptiste le clochard, faisant dix ans de plus. S'étant observé tout son soûl, il chercha David du regard. Le photographe lui souriait. Il lui fit signe de se lever et il s'exécuta, puis le rejoignit quelques mètres plus loin.

Trop heureux et n'ayant plus vraiment conscience de ce qu'il faisait, il se perdit dans son regard et le fixa au delà de ce que la bienséance autorisait. Lorsqu'il reprit ses esprits, il s'aperçut que le photographe avait rougi et affichait un sourire gêné. Il s'excusa à mi voix puis prit la direction de la porte de la boutique. David le rattrapa par le bras et le rassura d'un autre sourire, plus franc et amusé cette fois-ci.

Sans un mot, ils sortirent sur le pavé tout recouvert de blanc. La neige tombait à nouveau et Baptiste se laissa charmer. David, le tenant par le bras, le guida vers l'endroit qu'il avait repéré pour les prochaines photographies.

Baptiste ne prêta qu'une attention distraire au chemin qu'ils empruntèrent, mais lorsque David lui annonça, l'air parfaitement sérieux, « C'est là », il se figea, sans comprendre. Devant lui, il n'avait qu'une rue banale.

Il se tourna vers le photographe en fronçant les sourcils.

-Tu sais, je t'avais dit que le thème de mon dossier était « Évolution », commença-t-il à expliquer.

Le jeune homme acquiesça, sans que cela fût plus clair dans son esprit pour autant. L'homme reprit :

-Je t'ai d'abord photographié dans un état... miséreux, disons-le.

-C'est le mot, acquiesça-t-il.

-Voilà. Maintenant que tu es rasé et que tes cheveux sont coupés, tu vas aussi changer de posture pour les clichés. Je ne t'en dis pas plus, termina-t-il dans un sourire des plus agaçants. Je voulais juste te montrer l'endroit des prochaines photos, en fait.

Étonné, Baptiste écarquilla les yeux.

-On ne prend pas de photos ?

-Non.

-Qu'est-ce qu'on fait, alors ?

-On rentre. Tu veux te promener un peu ?

Baptiste baissa la tête, un peu surpris par la nouvelle.

-Non, admit-il à mi-voix.

David lui sourit puis le prit par le bras et ils se remirent en marche.

Ils furent rapidement arrivés chez le photographe, et le jeune homme s'empressa d'aller rendre visite à sa chienne. Il lui raconta sa journée à voix basse pour ne pas trop passer pour un imbécile auprès de son hôte qui avait voulu rester avec lui -il se moquait bien de l'opinion de la concierge.

Ils montèrent ensuite dans l'appartement de David. Baptiste fut soulagé d'y entrer après tout ce temps passé dehors. Plus le temps passait, et plus il se sentait bien dans ce lieu. Il accrocha son manteau nouvellement acheté à une patère, puis s'avança dans le salon. Il s'asseyait sur le canapé faisant face à la grande baie vitrée quand David lui demanda depuis la cuisine :

-Tu veux un chocolat ?

Baptiste se retourna vers son hôte qu'il pouvait apercevoir et lui répondit après un court moment de réflexion :

-Oui, merci.

Il reprit ensuite sa position initiale, confortablement installé dans ce canapé définitivement moelleux à souhait. Il se laissa aller et sa tête s'enfonça dans les coussins. Il était étrangement engourdi, mais parfaitement installé et le bien-être envahissait chaque partie de son corps.

Quelques minutes plus tard, David s'assit à sa droite et lui tendit une tasse remplie de liquide fumant. Le jeune homme le remercia puis, pris d'une soudaine envie, se pencha vers lui et l'embrassa sur la joue. Il recula ensuite, puis rougit en réalisant ce qu'il venait de faire. David, passé un court instant de surprise, lui sourit, les joues un peu roses, lui aussi. Baptiste se joignit à lui, ne regrettant finalement pas d'avoir suivi son instinct.

Sam 30 oct 2010 1 commentaire

Très biien comme suiite.

Juste au moment ou je me demandé comment Baptiste était devenu clodo à seulement 20 ans, j'ai ma réponse dans ce chapitre =).

Et justement je me demandé (encore) quand allé se faiire leur "rapprochement" et le voilà ki apparait en fin de chapitre. Lool !

Enfin voilà, je continue avec la suite.

Satsuki - le 04/12/2010 à 01h03