Rêves d'Absynthe

Le  temps  sembla  ralentir.

Les  secondes parurent  plus  longues et  le  vent  soufflait moins  fort.

 Aby eut  le temps de  sentir les  muscles du cavalier se raidir sous  son armure  de  cuir et de  métal. Elle  s’était  tant approchée  de  lui pour  mettre  fin à ses  jours, qu’elle sentait  à présent ses  poils  drus dépasser de ses vêtements.

Sur  l’instant son esprit ne pût que  les  comparer  à ceux  d’un sanglier.

Durs, épais, rêches, et  ternes.

Sombres et  noirs, ils  glissaient  sur  sa  peau au fur  et  à mesure que  la  brute se  tournait vers  elle.

Elle  releva le  visage vers  sa  nuque, tout  aussi velue, cependant ayant  un aspect plus  doux.

Comme  celui d’un chat  sauvage.

Elle  avait le  bassin collé  contre  le  troussequin de  la  selle (la  partie  surélevée  à l’arrière qui fait  butoir de  cu**), les  pierres incrustées  dans  le  cuir lui pénétraient  la  peau.

Mais elle souffrait en silence, retenant  son souffle et  se  penchant un peu plus  en arrière sur le destrier à chaque centimètre gagné par l’Autre.

Le profil de  son visage était enfin dans  son champ de  vision.

Front  bombé, longs  cils, un nez  plus  fin et  plus  discret  que celui des  humains, pommettes saillantes et  joues  légèrement  creusées.

Sa  bouche ?

Vulgaire gueule  de  porc, sans  lèvres ni moustache.

Simplement  plus  sombre  que  l’épiderme et  les  poils courts  du reste  de  son visage.

En bref le tout  semblait  bien plus  homogène et  évolué que  celui des  êtres  humains.

Si ce  n’est les  poils, qui, comme  chacun sait, n’ont  plus  aucune  utilité  de  nos  jours.

Une  odeur acre  lui parvint  aux  narines.

L’Autre venait d’ouvrir  la  gueule... Il poussa  un feulement agacé et d'ores et déjà victorieux.

De longues canines blanches contrastèrent  avec la  noirceur  de  sa  peau.

Pour le  reste  de  sa  dentition, il en était  de  la  même  sorte  que  celle  des humains.

Mais  cette  odeur  pestilentielle lui fit  presque  tourner  la  tête.

 

Faciès futuriste certes, mais  ces  Etres  avaient  loupé  l’invention du dentifrice !

 

Elle  le  vit  lever  le  coude, prêt à retourner  contre  elle son épée,  si pale et lumineuse.

 

« Genre  tu vas  te  débarrasser de  moi comme  ça  gros  Schnock ! Là tu rêves !!! »

 

Aby se  redressa  pour  arriver  à ses  épaules, et  planta  d’un coup sec  le petit  éclat de  métal qu’elle avait en main, transperçant  le  cuir de  sa  peau, là ou elle pensait  avoir des  chances de  le  blesser.

Son cou.

En effet  le bout  de  métal fit  jaillir  du sang, qui à sa  grande  surprise  était  rouge.

Certes  le  sang  demeure  rouge pour  presque  toutes  les  espèces, mais  dans  les  romans  de  science  fiction, le  sang  des  ennemis est noir  ou bien bleu.

Elle  était  prête  à lever  les  yeux  au ciel de  par  ses pensées  tout  à fait  inadéquates en cet  instant, quand  soudain le  brusque  mouvement  du cavalier ainsi que  son hurlement de douleur, la  projeta  en arrière.

 

« Haha  t’as  cru que  je tomberai seule  hein ? »

 

Elle  s’agrippa à ses  épaules, tirant sur  le  coté  ou il était  blessé, le faisant  à nouveau faire  un sursaut de  douleur.

Il tentait  de  se  dégager  de  sa  minuscule  emprise, lui assénant un grand coup de  coude  dans  le  visage.

Mais  la  douleur  ne  fit  pas  lâcher  prise  à Aby, qui semblait  de  moins en moins  motivée  à tomber  toute seule.

Elle  attrapa à pleines mains les  cheveux  de  son adversaire, et  se  laissa  tomber  lourdement  sur le sol, l’entraînant  à sa  suite.

Mer 14 mai 2008 Aucun commentaire