Rêves d'Absynthe

De  nos  jours :

Strasbourg, 5 octobre 2007, 7heures 55 du matin, une  jeune  femme  dévale, en courant et  avec  la  grâce d’un mammouth, ses  escaliers.

Arrivée  au rez  de  chaussée  elle  ferme rapidement sa veste, jette un coup d’œil furtif vers  la  porte  du  voisin « ultra-casse-couille » (tout  le  monde  le  connaît  hin  ), et  entend déjà des  pieds  traînants sur  le  parquet de  bois.

« Merde, merde, merde » marmonne-elle  en remontant  rapidement son écharpe jusqu’à ses  yeux et en sautant  dans  la  rue.

Elle  replace  rapidement  une  mèche de  cheveux couleur  framboise lui bouchant la  vue, prend  une  grande  inspiration et  commence à marcher  en direction du centre-ville, tout  en espérant  que  l’affreux  traîne-savate ne l’ai pas  poursuivie  jusque là.

Ses  pas  étaient  rapides  et précis  sous  le  ciel encore  zébré de  rose, elle  enjambait sachets en plastique, alcotest, bouteilles et  papiers  du MacDonald avec  la  grâce  du réveil et  l’habitude  d’une  citadine aguerrie. Dans  son champ de vision rétréci par le  brouillard, elle  distingue  des  formes sans  nom, autres  êtres  humains  se rendant  paisiblement  à leur  travail, ombres sans vie, totalement  intégrées  au décor, gris  des murs et  noir  du mac adam. (Même  conversation d'ailleurs).

Le  visage  caché  et  réchauffé  par  son écharpe sentant  encore  le  monoï des  journées  chaudes, elle  les  détaillait  de  haut  en bas. Ces  pauvres  brebis obéissantes qui changeaient  de  trottoir en regardant  le  sol au moindre  regard différent, plus  mauvais  ou plus  fou.

C’était  si facile, tous  étaient  de  pales  représentations de cette  civilisation d’êtres  surprotégés, incapables  de  faire  preuve de  caractère.

Bravant  le  froid mordant tout  à fait  inhabituel en cette  saison, la jeune femme arrivait au pont donnant sur la vieille ville, deux touristes japonais étaient déjà entrain de prendre des photos de l’Ill accoudés à la rambarde de fer forgé.

Elle passât à coté d’eux, les observant du coin de l’œil et murmura :

« Trois, deux, un…. »

« Ghaaaaaaaaaayayayayaaaa (etc) » se mit à hurler l’un des deux touristes très vite rejoint par son compère.

Un sourire sadique se dessina sur les lèvres de la jeune femme et elle marmonna gaiement

«  Ne jamais, jamais, jamais s’accouder aux rambardes strasbourgeoises après le passage de collégiens à chewing-gum dérangeant ».

 Un peu plus loin elle s’immobilisa près d’un livreur de bière à Winstub qui semblait abasourdi par la vapeur qui s’élevait de l’eau. Enfin un qui paraissait réfléchir. « Etrange hin » lui dit-elle en s’approchant de lui. Il relevât son visage vers elle, passât nerveusement la main sur sa moustache poivre et sel et lui répondit :

« Bah ma ptite dam’ vous savez, à la télé Ils ont dit que c’était normal, donc ‘doit pas y’avoir d’souci à s’faire ! ».

La demoiselle le fixa avec des yeux méprisants

« Ha bien sûr, les médias n’en parlent pas, donc  tout va  bien n’est ce  pas ? La  température  a chuté  de  vingt  degrés en quatre  jours  mais c’est normal puisqu’Ils n’en disent  rien. Bonne  journée monsieur ! »

Elle repris  sa  marche et  lança  un dernier «Abruti » avant  de  presser  le  pas  pour  ne  pas  arriver trop en retard.

Sam 10 mai 2008 Aucun commentaire